lees et des frimas a venir. O faux
bijou d'or fauve, l'automne est cache dans l'entortillement cassant
de ta mouture! Chacun de tes replis, feuille, de tes replis friables,
contient quelqu'une des miseres qui sont le declin de l'annee. Voici les
matins obscurs qu'un brouillard envelope et d'ou le soleil ne se degage,
tardif, que comme le visage pale d'un mourant deja couche dans ses
toiles: les soirs impatients sonnant a l'horizon, dans de longues
trompettes de cuivre, de muettes fanfares, des adieux pleins de silence;
tout ce cortege de tristesses vagues occupant la lenteur plus grande des
jours plus courts et dont le poete Leon Dierx a si magnifiquement dit,
dans un vers comparable aux plus beaux de Beaudelaire:
Le monotone ennui de vivre est en chemin.
Voici cette effroyable resurrection des corps qui nous montre, se
degageant de la terre comme des morts revoltes qu'un signal appelle, les
squelettes decharnes des arbres n'agitant plus, a leurs cimes, que des
lambeaux de verdure, des arbres dont l'ame s'est enfuie avec le murmure
de la brise dans les feuilles, avec les chansons des oiseaux exiles!
C'est sur le sable un grand bruissement de menus branchages que le
vent balaye et les derniers dahlias se ferment, captifs des longs fils
d'argent que tissent les araignees, inutiles ouvrieres d'octobre, qui
tentent de recoudre les uns aux autres et de soutenir encore dans l'air
tous ces coins de nature s'effondrant. La pitie des chrysantemes fleurit
le mausolee des floraisons mortes.
Ah! maudite feuille, voila le tableau melancolique que tu evoques sous
mes yeux!
* * * * *
Les choses de la Nature sont fraternelles aux choses de l'Amour; ou
plutot la Nature n'est qu'un grand decor symbolique dresse par le ciel
autour de nos tendresses. Celles-ci ont leur printemps tout fleuri
d'esperances, leur ete que le baiser du soleil rechauffe et murit, leur
automne ou le souvenir met encore des douceurs inquietes, leur hiver
qu'etreignent les neiges profondes de l'oubli. Heureux qui, fait plus
sage par les detresses passees, sait arreter son coeur dans cette course
et l'arracher a cette loi fatale, pour l'asseoir dans la serenite d'une
passion qui defie le lent travail des choses et des pensees se hatant
vers un meme declin! Cette force consciente et revoltee contre le destin
lui-meme ne nous vient pas en pleine jeunesse. C'est un fruit de la
douleur, et toutes les ames n'ont pas en elles ce q
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