meditait alors Boileau:
_Ce ne sont que festons, ce ne sont qu'astragales._
_........................_
_Et je me sauve a peine au travers du jardin._
Nous ferons comme Despreaux, nous entrerons dans ce parc age de
huit ans seulement, et dont les cimes, deja superbes,
s'epanouissaient rougissantes aux premiers rayons du soleil. Le
Notre avait hate le plaisir de Mecene; toutes les pepinieres
avaient donne des arbres doubles par la culture et les actifs
engrais. Tout arbre du voisinage qui offrait un bel espoir avait
ete enleve avec ses racines, et plante tout vif dans le parc.
Fouquet pouvait bien acheter des arbres pour orner son parc,
puisqu'il avait achete trois villages et leurs contenances pour
l'agrandir.
M. de Scudery dit de ce palais que, pour l'arroser, M. Fouquet
avait divise une riviere en mille fontaines et reuni mille
fontaines en torrents. Ce M. de Scudery en dit bien d'autres dans
sa _Clelie_ sur ce palais de Valterre, dont il decrit
minutieusement les agrements.
Nous serons plus sages de renvoyer les lecteurs curieux a Vaux que
de les renvoyer a la _Clelie_. Cependant il y a autant de lieues
de Paris a Vaux que de volumes a la _Clelie_.
Cette splendide maison etait prete pour recevoir _le plus grand
roi du monde_. Les amis de M. Fouquet avaient voiture la, les uns
leurs acteurs et leurs decors, les autres leurs equipages de
statuaires et de peintres, les autres encore leur plumes finement
taillees. Il s'agissait de risquer beaucoup d'impromptus.
Les cascades, peu dociles, quoique nymphes, regorgeaient d'une eau
plus brillante que le cristal; elles epanchaient sur les tritons
et les nereides de bronze des flots ecumeux s'irisant aux feux du
soleil.
Une armee de serviteurs courait par escouades dans les cours et
dans les vastes corridors, tandis que Fouquet, arrive le matin
seulement, se promenait calme et clairvoyant, pour donner les
derniers ordres, apres que ses intendants avaient passe leur
revue.
On etait, comme nous l'avons dit, au 15 aout. Le soleil tombait
d'aplomb sur les epaules des dieux de marbre et de bronze; il
chauffait l'eau des conques et murissait dans les vergers ces
magnifiques peches que le roi devait regretter cinquante ans plus
tard, alors qu'a Marly, manquant de belles especes dans ses
jardins qui avaient coute a la France le double de ce qu'avait
coute Vaux, le grand roi disait a quelqu'un:
-- Vous etes trop jeune, vous, pour avoir mange des peches de
M. Fou
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