s ferme, elle repeta sur un ton energique:
--Votre pere!...
Le Torero la fixait avec des yeux qui n'avaient plus rien de vivant, des
yeux qui semblaient implorer grace.
--Mon pere!... On m'avait dit pourtant...
--Quoi donc?
Et, de ses yeux, en apparence tres doux, elle le fouillait avec une
curiosite aigue. Savait-il? Ne savait-il pas?
--On m'avait dit qu'il etait mort, voici vingt ans et plus...
--Votre pere est vivant! dit-elle avec une energie croissante.
--Mort sous les coups du bourreau, acheva le Torero.
Elle haussa les epaules.
--Histoire inventee a plaisir, dit-elle. Ne fallait-il pas eloigner de
vous tout soupcon de la verite!
Et, en disant ces mots, elle le fouillait de plus en plus. Non!
decidement, il ne savait rien, car il reprit en se frappant le front:
--C'est vrai! Niais que je suis! Comment n'ai-je pas songe a cela?...
Alors, c'est vrai? dit-il d'une voix implorante, il vit?... Mon pere
vit?... Mon pere!...
Et il repetait doucement ce nom, comme s'il eut eprouve un soulagement
ineffable a le prononcer.
Tout autre que Fausta eut ete attendri, eut eu pitie de lui. Mais Fausta
ne voyait que le but a atteindre.
Froidement, implacable sous ses airs doucereux, elle reprit:
--Votre pere est vivant, bien vivant... malheureusement pour vous. C'est
lui qui vous poursuit de sa haine implacable, lui qui a jure votre
mort... et qui vous tuera, n'en doutez pas, si vous ne vous defendez
energiquement.
Ces mots rappelerent le jeune homme au sens de la realite, momentanement
oubliee. Mais, que son pere voulut sa mort, cela lui paraissait
impossible, contre nature. Instinctivement, il cherchait dans son esprit
une excuse a cette monstruosite. Et, tout a coup, il se mit a rire
franchement et s'ecria joyeusement:
--J'y suis!... Mordieu! madame, l'horrible peur que vous m'avez faite!
Est-ce qu'un pere peut chercher a meurtrir son enfant, la chair de sa
chair? Eh! non, c'est impossible! Mon pere ignore qui je suis. Dites-moi
son nom, madame, j'irai le trouver, et je vous jure Dieu que nous nous
entendrons.
Lentement, comme pour bien faire penetrer en son esprit chaque parole,
elle dit:
--Votre pere sait qui vous etes... C'est pour cela qu'il veut vous
supprimer.
Le Torero recula de deux pas et porta sa main crispee a sa poitrine,
comme s'il eut voulu s'arracher le coeur.
--Impossible! begaya-t-il.
--Cela est! dit Fausta rudement.
--Que maudite soit l'heure presente! to
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