xemple d'Arsene ne vous
effraie pas, et que vous vous sentez bien capable, comme lui, des plus
grands actes d'abnegation pour l'objet de votre amour?
--Mais que voulez-vous donc que je fasse? A quoi faut-il m'engager?
Dois-je donc epouser? Mais cela n'a pas le sens commun! Je suis mineur,
et mes parents ne me permettront jamais...
--Vous savez que je suis de la religion saint-simonienne a certains
egards, repondit Eugenie, et que je ne vois dans le mariage qu'un
engagement volontaire et libre, auquel le maire, les temoins et le
sacristain ne donnent pas un caractere plus sacre que ne le font l'amour
et la conscience. Marthe est, je le sais, dans les memes idees, et je
crois que jamais elle ni moi ne vous parlerons de mariage legal. Mais il
y a un mariage vraiment religieux, qui se contracte a la face du ciel;
et si vous reculez devant celui-la...
--Non, Eugenie, non, ma noble amie, s'ecria Horace: celui-la n'a rien
que je repousse. Je me plains seulement de la mefiance que vous me
temoignez; et, si vous la faites partager a votre amie, nous allons
changer, grand Dieu! la passion la plus spontanee et la plus vraie en
quelque chose d'arrange, de guinde et de faux, qui nous refroidira tous
les deux."
Pendant qu'Eugenie sondait ainsi avec une attention severe le coeur
d'Horace, a la meme heure, au meme instant, des atteintes plus profondes
etaient portees a celui d'Arsene. Il etait venu voir ses soeurs, ou
plutot Marthe, a la faveur de ce pretexte; et Louison etant sortie a
ce moment-la, Suzanne, qui etait mecontente du despotisme de sa soeur
ainee, avait resolu, elle aussi, de frapper un coup decisif. Elle prit
Arsene a part.
"Mon frere, lui dit-elle, je vous demande votre protection, et je
commence par reclamer le secret le plus profond sur ce que je vais vous
confier."
Arsene le lui ayant promis, elle lui raconta toute la conduite de
Louison a l'egard de Marthe.
"Vous croyez, dit-elle, qu'elle s'est reconciliee de bonne foi avec
Marton, et qu'elle ne lui cause plus aucun chagrin? Eh bien, sachez
qu'elle lui en prepare de bien plus grands, et qu'elle la hait plus que
jamais. Voyant que vous l'aimiez, et qu'elle ne reussirait pas a vous
detacher d'elle par des paroles, elle a resolu de l'avilir a vos yeux.
Elle a voulu la perdre, et je crois bien qu'elle y a reussi deja.
--L'avilir! la perdre! s'ecria Paul Arsene. Est-ce ma soeur qui parle?
est ce de ma soeur que j'entends parler?
--Ecoutez, Paul, repr
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