x, comme un monstre
d'egoisme, parce que je suis pauvre au point de ne pouvoir entretenir
une femme, et que je me respecte au point de ne vouloir pas me faire
laquais? Ah! sans doute, si le merite d'un homme se mesure au poids
de l'argent qu'il sait gagner, Paul Arsene est un heros et moi un
miserable!
--Il y a dans tout ce que vous dites, repliqua Eugenie, des idees
insultantes pour Marthe et pour moi, auxquelles je ne daignerai plus
repondre. Laissez-moi partir, Monsieur. La verite est dure; mais il
faudra que Marthe l'apprenne, et qu'elle renonce dans le meme jour a son
ami, a cause de vous, a vous, a cause d'elle-meme. Heureusement que
nous lui resterons! Theophile saura bien remplacer Arsene, avec plus de
desinteressement encore; moi aussi, je travaillerai pour elle et avec
elle; et jamais l'idee ne nous viendra que cela s'appelle _entretenir_
une femme!
--Eugenie, dit Horace en lui prenant les mains avec feu, ne me jugez pas
sans me comprendre. Vous vous repentiriez un jour de m'avoir avili aux
yeux de Marthe et aux miens propres. Je n'ai pas les doutes infames que
vous m'attribuez. Je parle sans mesure et sans discernement peut-etre;
mais aussi votre susceptibilite s'effarouche pour des mots, et la mienne
s'emporte a cause du blessant parallele que vous etablissez toujours
entre ce Masaccio et moi. Je n'ai pas l'instinct de l'imitation, j'ai
horreur des modeles qui posent pour la vertu; mais, sans rien affecter,
sans rien jurer, je puis bien, ce me semble, pratiquer dans l'occasion
le devouement jusqu'au sacrifice. Que pouvez-vous savoir de moi, puisque
Je n'en sais rien moi-meme; je n'ai pas encore ete mis a l'epreuve; mais
j'ai beau me tater et m'interroger, je ne trouve en moi ni elements
de lachete ni germes d'ingratitude. Pourquoi donc me condamnez-vous
d'avance? Vous avez de cruelles preventions contre moi, Eugenie; et je
ne pourrai plus respirer, faire un pas, ou dire un mot, que vous ne les
interpretiez a ma honte. Marthe ne pourra plus etouffer un soupir ou
verser une larme qui ne me soient imputes. Enfin, nous ne pourrons plus
exister l'un et l'autre sans que le nom d'Arsene soit suspendu sur nos
tetes comme un arret. Cela gene et contriste deja tous les elans de
mon coeur; mon avenir perd sa poesie, et mon ame sa confiance. Cruelle
Eugenie, pourquoi m'avez-vous dit toutes ces choses?
--Et vous n'avez pas plus de courage que cela? reprit Eugenie. Vous
craignez de vous humilier en me disant que l'e
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