Guise?
--Je pense, dit nettement le chevalier, qu'il est tout designe pour
monter sur le trone de France...
--Oui, dit Fausta. Mais ne pensez-vous pas aussi qu'il est plus digne de
la couronne que n'importe quel gentilhomme de ce pays?
Pardaillan prit un visage des plus stupefaits.
--Comment M. de Guise peut-il m'apparaitre brave et beau, a moi qui l'ai
soufflete!... Guise est un fauve, madame. Et puis...
--Achevez donc, chevalier, dit froidement Fausta.
--Soit! Je voulais vous dire ceci: que faites-vous vous-meme? Si belle,
madame, vous ne songez a rien de serieux, c'est-a-dire a l'amour, au
bonheur... Vous songez a des choses qui, d'avance, me font bailler
d'ennui... c'est-a-dire a des histoires de trone... Excusez-moi...
--Jamais je ne fus autant interessee... continuez! reprit Fausta dont le
regard lanca un sombre eclair.
--Merci, madame!... Je continue... Encore si ces histoires de trone
offraient un amusement quelconque... Mais non. Cela se complique...
Voulez-vous que je vous dise?... Eh bien, Henri de Guise ne sera pas roi
de France!...
--Pourquoi?... Voyons... pourquoi?...
--Parce que je ne veux pas, dit simplement Pardaillan. Vous etes
venue en France pour accomplir cette oeuvre. Eh bien, madame, vous ne
reussirez pas!
--Pourquoi? gronda Fausta... pourquoi?...
--Parce que je vous ai devinee, madame! Parce qu'une femme qui reve
de s'appeler Papesse est une chose qui me blesse, moi! parce que vous
voulez monter sur le trone aupres d'un homme que j'ai resolu d'ecarter
du trone!...
--Mais pourquoi ne reussirais-je pas? dit Fausta.
--Parce que vous allez me trouver sur votre chemin, madame!
Sur ces mots, Pardaillan s'inclina profondement. A ce moment retentit un
coup de sifflet strident. Et, en se redressant, le chevalier put croire
qu'il avait reve car Fausta avait disparu!... Il se retourna vivement.
--Ah! ah! s'ecria-t-il en eclatant de rire. Trois... sept... douze!...
Ca, messieurs, qu'etes-vous?
En parlant ainsi, Pardaillan avait tire sa longue rapiere, et,
s'acculant d'un bond a l'angle gauche de la piece, etait tombe en
garde... En effet, au coup de sifflet, en meme temps que Fausta
disparaissait par une porte dissimulee derriere les tentures du dais,
une douzaine d'hommes masques s'etaient rues, l'epee a la main....
A l'instant, la salle se remplit du cliquetis des fers froisses et
choques; puis, coup sur coup, il y eut un gemissement bref et un
hurlement prolonge:
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