tes diligemment
closes, venans a les ouvrir selon leur coustume, pour lui donner quelque
peu de pain, ne trouverent point leur prisonnier en son cachot. L'ayans
cerche et recerche par tout, sans pouvoir remarquer trace ni apparence
quelconque d'evasion, finalement rapporterent ceste merveille a leur
seigneur, qui de prime face s'en mocquoit et les menacoit, mais entendant
puis apres la verite, ne fut pas moins estonne qu'eux. Au bout de trois
jours apres ceste alarme, toutes les portes des prisons et du cachot
fermees comme devant, ce mesme prisonnier, sans le sceu d'aucun, aparut
renferme dedans son precedent cachot, ayant face et contenance d'homme
esperdu; lequel requit que sans delai l'on le menast vers ce seigneur,
auquel il avoit a dire choses de grande importance. Y ayant este conduit,
il raconte qu'il estoit revenu des enfers. L'occasion avoit este que ne
pouvant plus porter la rigueur de sa prison, vaincu de desespoir, craignant
la mort, et destitue de bon conseil il avoit appelle le diable a son aide,
a ce qu'il le tirast de ceste captivite. Que tost apres le malin en forme
hideuse et terrible lui estoit apparu dedans son cachot, ou ils avoyent
fait accord, suyvant lequel, il avoit este desferre et tire non sans griefs
tourmens hors de la, puis precipite en des lieux souterrains et
merveilleusement creux, comme au fond de la terre, ou il avoit veu les
cachots des meschans, leurs supplices, tenebres et miseres horribles, des
sieges puants et effrayables: des Rois, Princes, et grands Seigeurs,
plongez en des abysmes tenebreux: ou ils brusloyent au feu ardent en des
tourmens indicibles: qu'il avoit veu de Papes, Cardinaux, et autres Prelats
magnifiquement vestus, et autres sortes de gens, en divers equipages,
affligez de supplices distincts, en des goufres fort profonds, ou ils
estoyent tourmentez incessamment. Adjoustant qu'il y avoit reconnu
plusieurs de sa conoissance, notamment un de ses plus grands amis
d'autrefois, lequel l'avoit reconu, et enquis de son estat: le prisonnier
lui ayant raconte que leur pays estoit en main d'un rude maistre, l'autre
lui enjoignist qu'estant de retour il commandast a ce rude seigneur de
renoncer a ses tyranniques deportemens: et declarast que s'il continuoit sa
place estoit marquee en certain siege prochain qu'il monstra au prisonnier.
Et afin (dit cest esprit au prisonnier) que le seigneur dont nous parlons
adjouste foy a ton rapport, di lui qu'il se souvienne du conseil secret
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