une voix, le 10 fructidor an VII. Il avait perdu sa place de
bibliothecaire-adjoint; son pere l'envoya a Paris (vers 1800) pour y
continuer ses etudes interrompues; il y porta des romans deja faits, et
y contracta de nouvelles liaisons politiques. Apres un premier sejour
a Paris, il fut rappele a Besancon; c'etait l'epoque ou les emigres
commencaient a rentrer; il se lia avec ceux d'entre eux qui etaient
encore jeunes, et tourna au royalisme en combinant ses nouvelles
affections avec les anciennes. Revenu a Paris a l'epoque ou Bonaparte
consul visait de pres a l'empire, il y fit _la Napoleone_ (1802), encore
plus republicaine que royaliste: le dernier vers y salue _l'echafaud de
Sidney_. Il publia presque en meme temps le petit roman des _Proscrits_,
et, dans un genre fort different, une _Bibliographie entomologique_;
il avait ecrit des articles dans un journal d'opposition intitule _le
Citoyen francais_, qui paraissait pendant la premiere annee du Consulat.
Il avait deja fait imprimer a Besancon, en 1801, et tirer a vingt-cinq
exemplaires _Quelques Pensees de Shakspeare_, avec cette epigraphe de
Bonneville:
Genie agreste et pur qu'ils traitent de barbare.
En quittant chaque fois Besancon, Nodier y laissait un ami qu'il
revoyait toujours ensuite avec bonheur, qu'il emerveillait de ses
nouveaux recits, au coeur de qui il gravait comme sur l'ecorce du hetre
les chiffres du moment, et que quarante annees ecoulees depuis lors
n'ont pas arrache du meme lieu. Weiss, cet ami d'enfance, bibliographe
comme Nodier, et, qui plus est, homme d'imagination comme lui, l'un des
derniers de cette franche et docte race provinciale a la facon du XVIe
siecle, heritier direct des Grosley et des Boisot, l'excellent Weiss est
reste dans sa ville natale comme un exemplaire depose de la vie premiere
et de l'ame de son ami, un exemplaire sans les arabesques et les
dorures, mais avec les corrections a la main, avec les marges entieres
precieuses, et ce qu'on appelle en bibliographie les _temoins_. Qui donc
n'a pas ainsi quelqu'un de ces amis purs et fideles qui est reste
au toit quand nous l'avons deserte, le pigeon casanier qui garde la
tourelle? mais l'autre souvent ne revient pas. C'est le tome premier de
nous-meme, et celui presque toujours qui nous represente le mieux. Pour
savoir le Nodier d'alors, c'est bien moins le Nodier d'aujourd'hui, trop
lasse de s'entendre, qu'il eut fallu interroger, que le temoin memoratif
et glorieux d'un te
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