presence de Nodier, c'a ete ses agreables stances a M. Alfred de Musset:
J'ai lu ta vive Odyssee
Cadencee,
J'ai lu tes sonnets aussi,
Dieu merci!...
On peut dire de cette jolie piece melodieuse, touchante, et dont le
rhythme gracieux, mais expres tombant et un peu affaibli, exprime a
ravir un sourire deja las, qu'elle a ete le chant de cygne de Nodier:
Mais reviens a la vespree
Peu paree,
Bercer encor ton ami
Endormi.
Nodier, depuis bien des annees, et meme sans qu'aucune maladie positive
se declarat, ressentait souvent des fatigues extremes qui le faisaient
se mettre au lit avant le soir, chercher le sommeil avant l'heure. Il
aimait le sommeil, comme La Fontaine, et il l'a chante en des vers
delicieux, peu connus et que nous demandons a citer, comme exemple du
jeu facile et habituel de cette fantaisie sensible:
LE SOMMEIL.
Depuis que je vieillis, et qu'une femme, un ange,
Souffre sans s'emouvoir que je baise son front;
Depuis que ces doux mots que l'amour seul echange
Ne sont qu'un jeu pour elle et pour moi qu'un affront;
Depuis qu'avec langueur j'assiste a la veillee
Qu'enchantent son langage et son rire vermeil,
Et la rose de mai sur sa joue effeuillee,
Je n'aime plus la vie et j'aime le Sommeil;
Le Sommeil, ce menteur au consolant mystere,
Qui dejoue a son gre les vains succes du Temps,
Et sur les cheveux blancs du vieillard solitaire
Epand l'or du jeune age et les fleurs du printemps.
Il vient; et, bondissant, la Jeunesse animee
Reprend ses jeux badins, son essor etourdi;
Et je puise l'amour a sa coupe embaumee
Ou roule en serpentant le myrte reverdi.
Comme un enchantement d'esperance et de joie,
Il vient avec sa cour et ses choeurs gracieux,
Ou, sous des reseaux d'or et des voiles de soie,
S'enchainent des Esprits inconnus dans les cieux;
Soit que, dans un soleil ou le jour n'a point d'ombre,
Il me promene errant sur un firmament bleu,
Soit qu'il marche, suivi de Sylphides sans nombre
Qui jettent dans la nuit leurs aigrettes de feu:
L'une tombe en riant et danse dans la plaine,
Et l'autre dans l'azur parcourt un blanc sillon;
L'une au zephyr du soir emprunte son haleine,
A l'astre du berger l'autre vole un rayon.
C'est pour moi qu'elles vont; c'est moi seul qui les charme,
C'est moi qui les instruis a ne rien refuser.
Je n'ai jamais paye leurs rigueurs d'une larme,
Et leur levre jamais ne denie
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