s_, purent egalement se
ressentir de contes plus ou moins analogues; mais n'avait-il pas, sans
tant de provocations du dehors, cette autre lignee bien directe au coin
du feu, cette facile descendance du bon Perrault et de M. Galand? En
somme, il m'est evident que Nodier se trouve originellement en France de
cette famille poetique d'Hoffmann et des autres, et que s'il repond si
vite sur ce ton au moindre appel, c'est qu'il a l'accent en lui. Ce
qu'ils traduisent en chants ou en recits, il se ressouvient tout
aussitot de l'avoir pense, de l'avoir reve. Nodier peut etre dit un
frere cadet (bien Francais d'ailleurs) des grands poetes romantiques
etrangers, et il le faut maintenir en meme temps original: il etait en
grand train d'ebaucher de son cote ce qui eclatait du leur.
A l'egard de l'ecole francaise moderne, ce fut un frere aine des plus
empresses et des plus influents. On l'a vu, vingt ans auparavant, le
plus matinal au temeraire assaut et separe tout d'un coup de ceux-la, a
jamais inconnus, qui probablement eussent aide et succede. Nulle aigreur
ne suivit en lui ces mecomptes du talent et de la gloire. Les jeunes
essais, qui desormais rejoignent ses esperances brisees, le retrouvent
souriant, et il bat des mains avec transport aux premiers triomphes. Il
avait connu et aime Millevoye faiblissant; il enhardissait De Latouche,
editeur d'Andre Chenier; il n'eut qu'un cri d'admiration et de tendresse
pour le chant inoui de Lamartine. Il connut Victor Hugo de bonne heure,
a la suite d'un article qui n'etait pas sans reserve, si je ne me
trompe, sur _Han d'Islande_; il decouvrit vite, au langage vibrant du
jeune lyrique, les dons les plus royaux du rhythme et de la couleur. Un
voyage en Suisse qu'ils firent tous deux ensemble et en famille,
vers 1825, acheva et fleurit le lien. Dans le meme temps, par ses
publications avec son ami M. Taylor, par les descriptions de provinces
auxquelles il prit une part effective au moins au debut, il poussait
a l'intelligence du gothique, au respect des monuments de la vieille
France. Ses prefaces spirituelles, qu'en toute circonstance il ne
haissait pas de redoubler, harcelaient les classiques, et, en vrai pere
de Trilby, il sut piquer plus d'un de ses vieux amis sans amertume. Les
savantes experiences de sa prose cadencee, les artifices de deroulement
de sa plume en de certaines pages merveilleuses eussent ete plus
apprecies encore et eussent mieux servi la cause de l'art, si on ne les
a
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