antiques forets aux coupoles altieres,
Des bouquets du printemps mon parterre epaissi,
Le houx aux lances meurtrieres,
L'ancolie au front obscurci
Qui se penche sur les bruyeres,
Le jonc qui des etangs protege les lisieres,
Et la pale anemone et l'eclatant souci?
Les arbres que j'aimais ne croissent point ici.
O riant Quintigny, vallon rempli de graces,
Temple de mes amours, trone de mon printemps,
Sejour que l'esperance offrait a mes vieux ans,
Tes sentiers mal frayes ont-ils garde mes traces?
Le hasard a-t-il respecte
Ce bocage si frais que mes mains ont plante,
Mon tapis de pervenche, et la sombre avenue
Ou je plaignais Werther que j'aurais imite?...
Rien n'est doux et brillant comme de regarder a distance nos jeunes
annees malheureuses a travers ce prisme qu'on appelle une larme.
Le poete, chez Nodier, est deja bien avance, bien en train de murir:
une circonstance particuliere vint developper en lui le philologue, le
lexicographe, et lui permit des lors de pousser de front ce gout vif
a cote de ses autres predilections un peu contrastantes. Le chevalier
Herbert Croft, baronnet anglais, prisonnier de guerre a Amiens, ou il
s'occupait de travaux importants sur les classiques grecs, latins et
francais, eut besoin d'un secretaire et d'un collaborateur: Nodier lui
fut indique et fut agree; il obtint l'autorisation d'aller pres de lui.
Il nous a peint plus tard son vieil ami sous le nom legerement adouci
de sir Robert Grove, dans son attachante nouvelle d'_Amelie_. Il
etait impossible de toucher un tel portrait a la Sterne avec une plus
gracieuse et, pour ainsi dire, affectueuse ironie: "Ce qui faisait
sourire l'esprit, conclut-il, dans les innocentes manies du chevalier,
faisait en meme temps pleurer l'ame. On se disait: Voila pourtant ce
que nous sommes, quand nous sommes tout ce qu'il nous est permis d'etre
au-dessus de notre espece!"
Sans plus recourir au portrait un peu flatte du vieux savant dans
_Amelie_ et en m'en tenant aux notices critiques de Nodier meme, du
vivant ou peu apres la mort du chevalier[179], il en resulte que sir
Herbert Croft, ancien eleve de l'eveque Lowth qui a ecrit l'_Essai sur
la Poesie des Hebreux_, l'eleve aussi et le collaborateur du docteur
Johnson soit pour la _Vie d'Young_, soit pour les travaux du
Dictionnaire, avait de plus en plus creuse et raffine dans les
recherches litteraires et dans l'etude singuliere des mots. Doue par la
nature de l'
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