brillant appat de _la Californienne_.
Une couple de barques longeaient le quai pour prendre les retardataires
qui avaient passe en ville les dernieres heures. On voyait voguer
egalement quelques autres canots sur le fleuve. Chacun d'eux avait un
drapeau belge au gouvernail, et ceux qui le montaient envoyaient leurs
adieux a la ville d'Anvers et a l'Europe, et faisaient un tel vacarme en
entrant et en battant des mains, qu'ils avaient l'air de gens ivres ou
fous.
En ce moment, trois personnes, un bourgeois avec ses deux fils,
sortirent en hate d'une rue aboutissant au quai et se dirigerent vers le
lieu ou se trouvaient les barques.
--Vois, vois, mon pere, dit l'aine des deux jeunes gens, voila _le
Jonas_ qui attend avec impatience.
--Que Dieu le protege! dit en soupirant le vieux bourgeois.
--Mais allez-vous vous attrister maintenant, mon pere? dit le jeune
homme en riant. Que sont deux annees dans la vie d'un homme? J'en ai use
au moins six devant un stupide pupitre. Pas d'inquietude! au contraire,
soyez content et ayez confiance. Je reviendrai avec des monceaux d'or,
avec des tresors, et ce sera mon orgueil d'avoir procure a mon pere et a
mon frere une vie douce et paisible. Ainsi, ne soyez pas inquiet: vous
n'aurez jamais de raisons de regretter ce voyage... Mais ou reste donc
Victor? Aurait-il mal aux jambes, maintenant que l'heure decisive est
arrivee?
--Sa mere et lui ont tant de choses a se dire! murmura le vieux bourgeois.
--Vois, Jean, ils viennent la-bas, remarqua le frere. Cette pauvre Lucie
Morrelo, elle marche la tete haute et parait contente; mais la servante
du capitaine m'a dit que, depuis huit jours, elle ne fait que pleurer
lorsqu'elle est seule.
--Tant mieux, mon frere.
--Comment cela?
--Certainement, c'est une preuve qu'elle aime sincerement mon ami
Victor. Cela me rejouit pour lui.
Les personnes dont l'arrivee avait ete annoncee par le frere de Jean se
montrerent bientot au coin de la rue. C'etait une dame deja vieille, qui
marchait en parlant a cote d'un jeune homme et lui pressait la main avec
une tendresse inquiete, pendant que lui dirigeait vers _le Jonas_,
pavoise comme aux jours de fete, des yeux ou brillait une joyeuse
excitation.
Derriere eux venait un homme avec des joues tannees et de larges
favoris, qui donnait le bras a une tres-jeune fille au visage charmant
et delicat, et s'efforcait de lui faire comprendre, en riant et en
plaisantant, qu'un voyage en mer n'e
|