tait pas plus dangereux qu'une
petite excursion a Bruxelles par le chemin de fer.
--Victor, Victor, depeche-toi! on leve deja l'ancre la-bas! s'ecria
Jean, qui se tenait debout dans une barque. On nous annonce qu'il n'y a
plus de temps a perdre.
Lorsque la veuve regarda, du bord de l'Escaut, le faible esquif qui
allait dans quelques minutes lui enlever, pour toujours peut-etre, son
fils bien-aime, les larmes tomberent sur ses joues et elle le pressa en
sanglotant dans ses bras. Ce tendre embrassement emut profondement
Victor, et il s'efforca de consoler et de tranquilliser sa mere affligee
par de douces paroles, et en lui promettant plus d'aisance et de bonheur
pour ses vieux jours.
Il fut reste longtemps encore sur le coeur de sa mere, sourd a l'appel
de son ami; mais le vieux capitaine, l'oncle de Lucie, l'arracha de ses
bras en se moquant de cet exces d'attendrissement. Jean, de son cote,
criait plus fort que jamais que la barque ne pouvait attendre plus
longtemps.
Victor prit les deux mains de la jeune Lucie dans les siennes et penetra
par un long regard jusqu'au fond de son coeur; ses yeux demandaient:
"M'attendras-tu? Ne m'oublieras-tu pas?" La demande et la reponse
devaient etre toutes les deux tres-emouvantes, car un torrent de larmes
roula sur le visage de la jeune fille, et le visage du jeune homme
s'illumina d'une joie extreme.
Le marin prit Victor par le bras et l'entraina vers la barque. Le jeune
homme, emu, embrassa encore sa mere et murmura a son oreille les plus
ardentes paroles d'amour.
--Eh bien, puisque Dieu l'a permis, dit-elle en sanglotant, va, mon
fils; je prierai pour toi tous les jours, toutes les heures. Ne m'oublie
pas! N'oublie pas ta mere!
Victor descendit dans le canot: les rames plongerent dans le fleuve...
En ce moment, on vit accourir de loin un jeune homme qui agitait ses
bras au-dessus de sa tete, avec des gestes inquiets, et qui criait:
--Attendez un peu, pour l'amour de Dieu! Je suis Donat Kwik; j'ai paye
mon passage; il faut que j'aille aussi au pays de l'or!
Ce jeune homme paraissait etre un paysan; la longue redingote bleue qui
lui pendait jusqu'aux talons, son visage rouge et bouffi, son air naif
ou bete, et surtout ses grandes mains et ses membres robustes et trapus,
indiquaient qu'il avait quitte les travaux des champs pour courir
egalement apres la fortune.
Son premier pas ne fut cependant point heureux. Dans sa crainte que le
canot ne partit sans lui, i
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