universelle, il faut que
l'ame consiste materiellement dans l'universel. L'ame disparait donc; ou
n'est au fond qu'un universel ou un indetermine.
Ainsi, de la theorie aristotelique ou scolastique de l'etre resulterait,
d'une part, la disparition des elements physiques des corps, de l'autre,
l'impossibilite d'attribuer une existence substantielle a l'ame. Voici
comment Abelard se tire de ces deux difficultes.
Le nom d'universel n'a pas ete donne, selon lui, a cette collection
totale de toutes les essences, laquelle, _informee_ par la
susceptibilite des contraires, se divise partie en corps, partie en
esprit, mais seulement a ce qui, dans cette multitude, grace a la
susceptibilite des contraires, recoit et soutient essentiellement la
corporeite, et qui n'a rien de commun avec l'essence de l'esprit[82]. Si
l'on demande comment le meme nom, ce nom d'universel, ne serait donne
qu'a une partie de la multitude comprise sous le titre de pure essence,
et non a l'autre partie qui, a ce degre de l'echelle de l'etre, n'en est
pas differente, en ce sens que l'une et l'autre partie de la collection
sont constituees de ce qu'il y a de commun dans toutes les substances;
si l'on ajoute qu'on ne peut imposer a une partie un nom qui signifie
une chose d'une nature contradictoire a celle de la partie qui,
generiquement, n'est pas differente de la premiere, regle suivie
jusque-la dans toute l'echelle, Abelard repond que nul ne peut faire
qu'en imposant le nom on ait eu egalement dans la pensee les essences
qui recevraient la forme de l'esprit et celles qui recevraient la forme
du corps; car ce n'est pas des choses insensibles, mais des choses
sensibles qu'on monte aux intellectuelles, et c'est ici du genre _corps_
que l'on s'est eleve a la matiere incorporelle. Ce que le physicien a
nomme universel, c'est cette matiere de la substance (_ce de matiere,
illud materiae_) que la pensee rencontre, a titre d'essence, en montant
du sensible a l'intellectuel, et nullement un principe generiquement
non-different, un non-different quelconque auquel il n'a peut-etre pas
songe, dont il n'avait pas a s'occuper (_vel non cogitavit, vel non
curavit_). "Son office, a lui, n'est pas de feindre ou de dissimuler,
comme les dialectitiens; aussi Platon dit-il qu'avant son temps personne
n'avait traite de cette substance elementaire[83]."
[Note 82: Ceci n'est pas tout a fait conforme a une proposition inseree
quelques pages plus haut, et dont le sens se re
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