qu'a nos jours.
Mais je ne suis pas, je ne serai pas ecrivain politique, parce que, pour
etre lu en France aujourd'hui, il faut s'en prendre aux hommes, faire
du scandale, de la haine, du cancan meme. Si on se borne a disserter, a
precher, a expliquer, on ennuie, et autant vaut se taire.
Emile de Girardin a la forme quand il veut; il n'a pas le vrai fond.
Louis Blanc a le fond et la forme. On ne s'en occupe point. Il se doit
a lui-meme d'ecrire toujours, parce qu'il a un parti et qu'il ne peut
l'abandonner apres l'avoir forme. Mais, en dehors de son parti, il est
sans action.
Et parlons de Louis Blanc maintenant, puisque vous le voulez. Pour moi,
c'est lui qui a raison, c'est lui qui est dans le vrai. Vous me parlez
de ses defauts personnels. Il a les siens, sans doute, et certainement
Ledru-Rollin est plus conciliant, plus engageant, plus entoure,
plus _entourable_, plus populaire par consequent. Mais, dans la vie
politique, Louis Blanc est _un homme sur_. Que m'importe que, dans la
vie privee, il ait autant d'orgueil que l'autre a de vanite, si, dans
la vie publique, il sait sacrifier orgueil ou vanite a son devoir? Je
compte sur lui, je sais ou il va, et je sais aussi qu'on ne le fera
pas devier d'une ligne. J'ai trouve en lui des asperites, jamais de
faiblesse; des souffrances secretes, aussitot vaincues par un sentiment
profond et tenace du devoir. Il est trop avance pour son epoque, c'est
vrai. Il n'est pas immediatement utile, c'est vrai. Son parti est
restreint, et faible, c'est vrai; il n'aurait d'action qu'en se joignant
a celui de Ledru-Rollin. Mais voila ce que je ne lui conseillerai
jamais; car Ledru-Rollin ne s'unira jamais sincerement a lui, et
travaillera desormais plus qu'autrefois a le paralyser ou a l'aneantir.
Louis Blanc ne peut plus etre solidaire des frasques du parti de
Ledru-Rollin, Il ne le doit pas. Qu'il reste a l'ecart, s'il le faut;
son jour viendra plus tard, qu'il se reserve! Est-ce qu'il n'a pas la
verite pour lui? est-ce qu'il ne faudra pas, apres bien des luttes
inutiles et deplorables, en venir a _accorder a chacun suivant ses
besoins?_ Si nous n'en venons pas la, a quoi bon nous agiter, et pour
quoi, pour qui travaillons-nous? Vous voudriez qu'il mit sa formule,
dans sa poche pour un temps, et qu'il employat son talent, son merite,
sa valeur individuelle, son courage, a faire de la politique de
transition. Moi aussi, je le lui conseillerais, s'il pouvait se joindre
a des homm
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