pris ou se cachait l'amoureux!
Merci! merci! messager de mon coeur!
Il vole comme le desir. Il fait le tour du monde dans sa journee. Le
soir, il revient; il se pose au pied de ma couche; il me raconte ce
qu'il a vu, les mers qui ont passe sous lui avec les poissons et les
navires, les grands deserts vides qu'il a contemples du haut des cieux,
et toutes les moissons qui se courbaient dans la campagne, et les
plantes qui poussaient sur le mur des villes abandonnees.
Elle tord ses bras, langoureusement.
Oh! si tu voulais, si tu voulais!... J'ai un pavillon sur un
promontoire au milieu d'un isthme, entre deux oceans. Il est lambrisse
de plaques de verre, parquete d'ecailles de tortue, et s'ouvre aux
quatre vents du ciel. D'en haut, je vois revenir mes flottes et les
peuples qui montent la colline avec des fardeaux sur l'epaule. Nous
dormirions sur des duvets plus mous que des nuees, nous boirions des
boissons froides dans des ecorces de fruits, et nous regarderions le
soleil a travers des emeraudes! Viens!...
Antoine se recule. Elle se rapproche; et d'un ton irrite:
Comment? ni riche, ni coquette, ni amoureuse? ce n'est pas tout cela
qu'il te faut, hein? mais lascive, grasse, avec une voix rauque, la
chevelure couleur de feu et des chairs rebondissantes. Preferes-tu un
corps froid comme la peau des serpents, ou bien de grands yeux noirs,
plus sombres que les cavernes mystiques? regarde-les, mes yeux!
Antoine, malgre lui, les regarde.
Toutes celles que tu as rencontrees, depuis la fille des carrefours
chantant sous sa lanterne jusqu'a la patricienne effeuillant des roses
du haut de sa litiere, toutes les formes entrevues, toutes les
imaginations de ton desir, demande-les! Je ne suis pas une femme, je
suis un monde. Mes vetements n'ont qu'a tomber, et tu decouvriras sur ma
personne une succession de mysteres!
Antoine claque des dents.
Si tu posais ton doigt sur mon epaule, ce serait comme une trainee de
feu dans tes veines. La possession de la moindre place de mon corps
t'emplira d'une joie plus vehemente que la conquete d'un empire. Avance
tes levres! mes baisers ont le gout d'un fruit qui se fondrait dans ton
coeur! Ah! comme tu vas te perdre sous mes cheveux, humer ma poitrine,
t'ebahir de mes membres, et brule par mes prunelles, entre mes bras,
dans un tourbillon ...
Antoine fait un signe de croix.
Tu me dedaignes! adieu!
Elle s'eloigne en pleurant, puis se retourne:
Bien sur? une femme si b
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