choquaient, la
terre haletante buvait le fleuve avec ivresse. Dieu a cornes de taureau
tu t'etalais sur ma poitrine--et on entendait le mugissement de la vache
eternelle!
Les semailles, les recoltes, le battage des grains et les vendanges se
succedaient regulierement, d'apres l'alternance des saisons. Dans les
nuits toujours pures, de larges etoiles rayonnaient. Les jours etaient
baignes d'une invariable splendeur. On voyait, comme un couple royal, le
Soleil et la Lune a chaque cote de l'horizon.
Nous tronions tous les deux dans un monde plus sublime,
monarques-jumeaux, epoux des le sein de l'eternite,--lui, tenant un
sceptre a tete de concoupha, moi un sceptre a fleur de lotus, debout
l'un et l'autre, les mains jointes;--et les ecroulements d'empire ne
changeaient pas notre attitude.
L'Egypte s'etalait sous nous, monumentale et serieuse, longue comme le
corridor d'un temple, avec des obelisques a droite, des pyramides a
gauche, son labyrinthe au milieu,--et partout des avenues de monstres,
des forets de colonnes, de lourds pylones flanquant des portes qui ont a
leur sommet le globe de la terre entre deux ailes.
Les animaux de son zodiaque se retrouvaient dans ses paturages,
emplissaient de leurs formes et de leurs couleurs son ecriture
mysterieuse. Divisee en douze regions comme l'annee l'est en douze
mois,--chaque mois, chaque jour ayant son dieu,--elle reproduisait
l'ordre immuable du ciel; et l'homme en expirant ne perdait pas sa
figure; mais, sature de parfums, devenu indestructible, il allait dormir
pendant trois mille ans dans une Egypte silencieuse.
Celle-la, plus grande que l'autre, s'etendait sous la terre.
On y descendait par des escaliers conduisant a des salles ou etaient
reproduites les joies des bons, les tortures des mechants, tout ce qui a
lieu dans le troisieme monde invisible. Ranges le long des murs, les
morts dans des cercueils peints attendaient leur tour; et l'ame exempte
des migrations continuait son assoupissement jusqu'au reveil d'une
autre vie.
Osiris, cependant, revenait me voir quelquefois. Son ombre m'a rendu
mere d'Harpocrate.
Elle contemple l'enfant.
C'est lui! Ce sont ses yeux; ce sont ses cheveux, tresses en cornes de
belier! Tu recommenceras ses oeuvres. Nous refleurirons comme des lotus.
Je suis toujours la grande Isis! nul encore n'a souleve mon voile! Mon
fruit est le soleil!
Soleil du printemps, des nuages obscurcissent ta face! L'haleine de
Typhon devore le
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