t leur bouche contre sa peau, s'arrachent le pain qu'il a mordu.
C'est toi! c'est toi!
Eleve d'abord par Moise, brise par Ezechias, retabli par le Messie. Il
t'avait bu dans les ondes du bapteme; mais tu l'as quitte au jardin des
Olives, et il sentit alors toute sa faiblesse.
Tordu a la barre de la croix, et plus haut que sa tete, en bavant sur la
couronne d'epines, tu le regardais mourir.--Car tu n'es pas Jesus, toi,
tu es le Verbe! tu es le Christ!
Antoine s'evanouit d'horreur, et il tombe devant sa cabane sur les
eclats de bois, ou brule doucement la torche qui a glisse de sa main.
Cette commotion lui fait entr'ouvrir les yeux; et il apercoit le Nil,
onduleux et clair sous la blancheur de la lune, comme un grand serpent
au milieu des sables;--si bien que l'hallucination le reprenant, il n'a
pas quitte les Ophites; ils l'entourent, l'appellent, charrient des
bagages, descendent vers le port. Il s'embarque avec eux.
Un temps inappreciable s'ecoule.
Puis, la voute d'une prison l'environne. Des barreaux, devant lui, font
des lignes noires sur un fond bleu;--et a ses cotes, dans l'ombre, des
gens pleurent et prient entoures d'autres qui les exhortent et les
consolent.
Au dehors, on dirait le bourdonnement d'une foule, et la splendeur d'un
jour d'ete.
Des voix aigues crient des pasteques, de l'eau, des boissons a la glace,
des coussins d'herbes pour s'asseoir. De temps a autre, des
applaudissements eclatent. Il entend marcher sur sa tete.
Tout a coup, part un long mugissement, fort et caverneux comme le bruit
de l'eau dans un aqueduc.
Et il apercoit en face, derriere les barreaux d'une autre loge, un lion
qui se promene,--puis une ligne de sandales, de jambes nues et de franges
de pourpre. Au dela, des couronnes de monde etagees symetriquement vont
en s'elargissant depuis la plus basse qui enferme l'arene jusqu'a la plus
haute, ou se dressent des mats pour soutenir un voile d'hyacinthe, tendu
dans l'air, sur des cordages. Des escaliers qui rayonnent vers le centre,
coupent, a intervalles egaux, ces grands cercles de pierre. Leurs gradins
disparaissent sous un peuple assis, chevaliers, senateurs, soldats,
plebeiens, vestales et courtisanes,--en capuchons de laine, en manipules
de soie, en tuniques fauves, avec des aigrettes de pierreries, des panaches
de plumes, des faisceaux de licteurs; et tout cela grouillant, criant,
tumultueux et furieux l'etourdit, comme une immense cuve bouillonnante.
Au milie
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