ette et
opprimee.
"Dans les circonstances difficiles ou s'est trouvee Therese, elle n'a donc
pu avoir ni l'appui, ni les conseils, ni les secours, ni les consolations
de sa mere. Pourtant celle-ci l'aime d'autant plus qu'elle est forcee de
la voir en secret, a la derobee, quand elle reussit a venir passer seule
un ou deux jours a Paris, comme cela lui est arrive dernierement. Encore
n'est-ce que depuis quelques annees qu'elle a pu inventer je ne sais quels
pretextes et obtenir ces rares permissions. Therese adore sa mere, et
n'avouera jamais rien qui puisse la compromettre. Voila pourquoi vous ne
lui entendez jamais souffrir un mot de blame sur la conduite des autres
femmes. Vous avez pu croire qu'elle reclamait ainsi tacitement
l'indulgence pour elle-meme. Il n'en est rien. Therese n'a rien a se faire
pardonner; mais elle pardonne tout a sa mere: ceci est l'histoire de leurs
relations.
"A present, j'ai a vous raconter celle de la comtesse de... _trois
etoiles_. C'est ainsi, je crois, que vous dites en francais quand vous ne
voulez pas nommer les gens. Cette comtesse, qui ne porta ni son titre, ni
le nom de son mari, c'est encore Therese.
--Elle est donc mariee? elle n'est pas veuve?
--Patience! elle est mariee, et elle ne l'est pas. Vous allez voir.
"Therese avait quinze ans quand son pere le banquier se trouva veuf et
libre; car ses enfants legitimes etaient tous etablis. C'etait un
excellent homme, et, malgre la faute que je vous ai racontee et que je
n'excuse pas, il etait impossible de ne pas l'aimer, tant il avait
d'esprit et de generosite. J'ai ete tres-lie avec lui. Il m'avait confie
l'histoire de la naissance de Therese, et il me mena a divers intervalles,
en visite avec lui, au couvent ou il l'avait mise. Elle etait belle,
instruite, aimable, sensible. Il eut souhaite, je crois, que je prisse la
resolution de la lui demander en mariage; mais je n'avais pas le coeur
libre a cette epoque; autrement... Mais je ne pouvais y songer.
"Il me demanda alors des renseignements sur un jeune Portugais noble qui
venait chez lui, qui avait de grandes proprietes a La Havane et qui etait
tres-beau. J'avais rencontre ce Portugais a Paris, mais je ne le
connaissais reellement pas, et je m'abstins de toute opinion sur son
compte. Il etait fort seduisant; mais, pour ma part, je ne me serais
jamais fie a sa figure; c'etait ce comte de *** avec qui Therese fut
mariee un an plus tard.
"Je dus aller en Russie; quand je
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