nante que ni dans la "fosse aux femmes",
ni dans la "fosse aux huiliers", ni nulle part dans toute la fabrique,
il n'y avait ame qui vive.
--C'est la greve, soupira Sefietje d'une voix blanche.
A six heures et demie, son heure habituelle, M. de Beule descendit.
Avant d'avoir quitte sa chambre, il avait ete frappe par le silence
insolite qui regnait dans la fabrique et, tout de suite, il demanda a
Sefietje:
--D'ou vient que ca ne tourne pas?
--Monsieur, dit Sefietje, hoquetante, la respiration coupee, il n'y a
personne a la fabrique!
--Comment ca! s'ecria M. de Beule.
Et il se precipita dans le jardin. Sefietje courut en toute hate a
l'etage pour avertir Mme de Beule et M. Triphon. Ils descendaient au
moment meme ou M. de Beule, fou de rage, revenait de la fabrique.
--Veux-tu savoir maintenant ce qu'il en est de ces voyous?... hurla-t-il
du plus loin qu'il vit sa femme.
Mme de Beule ne devait rien savoir. Elle n'en savait que trop. Mains
jointes, elle soupira:
--Quelle affaire, mon Dieu! Quelle affaire!
--Ces voyous! Ces saligauds! Ces vauriens! Ces mendiants! rugit M. de
Beule. Plus un seul d'entre eux ne remettra les pieds a la fabrique.
D'autres ouvriers! Tout de suite!
--Ou les prendre? demanda anxieusement Mme de Beule.
Cette simple question partit surexciter au plus haut point M. de Beule.
--Tu ne t'imagines pourtant pas que ca m'embarrasse? dit-il.
Se tournant vers Sefietje il ordonna:
--Va d'abord et avant tout demander a Justin-la-Craque s'il veut soigner
les chevaux.
La fureur s'etranglait dans sa gorge. Il tonna:
--Les sales individus! Ils ont laisse ces pauvres betes sans nourriture!
--Pardon, monsieur, moi je leur ai donne hier soir du foin et de
l'avoine, dit Sefietje d'une voix qu'on entendait a peine.
Et elle s'empressa de courir chez Justin. Ce qu'il fallait avant tout,
c'etait un chauffeur. Qui prendrait-on pour remplacer Bruun? Ils
chercherent, sans trouver personne qui eut les aptitudes requises.
--Doorke Pruime, peut-etre, risqua timidement Mme de Beule.
Agace, M. de Beule haussa rageusement les epaules.
--Soyons serieux, hein! grommela-t-il.
Mme de Beule se tint coite.
--Moi, je puis le faire, dit brusquement M. Triphon sans regarder son
pere.
Oh! oui, mon garcon, fais-le! s'ecria Mme de Beule en regardant son fils
avec une admiration attendrie.
Par rancune inveteree, M. de Beule ne souffla mot, mais son silence meme
voulait dire qu'il acce
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