te mele donc pas de ces affaires-la! dit M. de Beule, se
retournant agace.
Avec un soupir Mme de Beule s'eloigna. Fixement, de ses yeux vitreux
d'alcoolique Justin regardait M. de Beule. Il crut sentir qu'il
hesitait, flechissait.
--Je vais le leur dire! Je vais le leur dire! s'ecria-t-il brusquement
dans un transport d'enthousiasme, en faisant un mouvement vers la porte.
--A tes risques et perils, Justin! Ca vient de toi! cria M. de Beule
d'un ton severe.
--Oui ... oui ... ca vient de moi! cria Justin.
Et d'un saut il fut dans la rue.
--Ils vont revenir! jubila Mme de Beule avec un soupir de soulagement.
Mais M. de Beule la toisa d'un regard courrouce et repliqua:
--Qu'en sais-tu? Et d'ailleurs, qui te dit que je les laisserai rentrer?
Mme de Beule prefera ne rien repondre. Et elle se rendit a la cuisine
aupres de Sefietje, pour parler du diner.
VIII
Le dimanche s'ecoula, exceptionnellement tranquille. Ce calme absolu
donnait au village un air morne; on l'eut dit abandonne. M. Triphon, en
rentrant vers cinq heures, apporta cette etrange nouvelle: il avait
rencontre Berzeel dans la rue, et il n'etait pas ivre.
--Il n'etait pas ivre! s'ecria Sefietje, stupefaite et presque alarmee.
--Non; absolument pas! Aussi frais que je suis! affirma M. Triphon.
Sefietje n'en revenait pas. Ses pommettes se colorerent du rouge des
grandes agitations interieures.
--Est-ce qu'il y a du nouveau? demanda Mme de Beule en s'approchant,
l'air inquiet.
--Non, maman, sauf que Berzeel se promene dans le village et qu'il n'est
pas ivre, repeta M. Triphon.
--Oh! ca, c'est bien! dit Mme de Beule satisfaite.
M. de Beule, occupe a ecrire dans son bureau, parut egalement au bruit
des voix et, d'un air rogue, demanda ce qui se passait. Mme de Beule lui
communiqua l'etonnante nouvelle, ajoutant que cela lui semblait de tres
bon augure.
--Etait-il seul? demanda M. de Beule a sa femme, evitant, selon sa
hargneuse habitude, d'adresser directement la parole a son fils.
--Tout seul, repondit M. Triphon d'un ton mat, affectant, de son cote,
de ne pas regarder son pere.
--Ca peut encore venir. Il n'est pas trop tard pour se saouler, ricana
M. de Beule.
Tout de meme, il n'etait pas de trop mechante humeur, ce jour-la. Au
contraire. On aurait presque pu lui trouver un soupcon d'air enjoue, si
le mot n'eut jure avec son caractere. Il ralluma un bout de cigare, ce
qui etait generalement bon signe, et rentr
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