t ans, petit pere se
fatigue a travailler le soir pour moi.
Devant tant de devouement et d'amour paternels et maternels, je n'ai
montre souvent qu'ingratitude et desobeissance, que mauvaise humeur.
Malgre mon attitude froide, ne croyez pas que neanmoins la plus tendre
affection n'existait pas chez moi. Avec l'experience et l'age, j'ai
appris a vous connaitre et a vous aimer. Je vous ai compares aux autres
parents. J'ai toujours trouve que vous etiez les meilleurs et surtout
ceux qui voyaient le mieux l'avenir de leur enfant.
Cette lettre vous arrivera si un accident m'arrivait. Gardez un bon
souvenir de votre enfant cher qui vous aime de toute son ame et qui fut
vraiment heureux entre petit pere et petite mere.
Je vous remercie de vos prieres pour que Dieu me conserve. Que Dieu vous
benisse!
Votre enfant qui vous embrasse mille fois tous les deux et qui pense
toujours a vous.
ROGER.
_Lettre ecrite par le Sergent Francois CAYROL, 2e Zouaves, tombe au
champ d'honneur._
5 Juin 1916.
Mes chers parents,
Je vous ai ecrit hier a mon arrivee et avant-hier pendant mon voyage. Je
suis en bonne sante; je suis bien repose; je suis maintenant tout a fait
a mon aise. Comme je vous l'ecrivais hier, il y aura bientot un renfort
pour le front; je dois en faire partie.
Deux officiers de ma compagnie y participeront aussi; je suis content de
cela car ils savent ce que je peux valoir et surement ils me garderont
aupres d'eux.
Le depart de ce renfort est tres proche, peut-etre aura-t-il lieu
apres-demain. Ainsi mon desir va etre exauce; j'aurai attendu,
contrairement a mon attente, sept mois pour affronter a nouveau les
dangers de la lutte. Cette perspective me rejouit; je ne serai vraiment
qu'au combat a mon poste veritable de soldat.
Ne soyez pas en peine pour moi; car s'il y en a bien un qui doive etre
en peine, c'est moi. J'ai confiance en ma destinee; meme si ma vie
devait etre ravie, je n'en exprime aucun regret, car je l'ai offerte
en sacrifice a Notre Souverain Createur, pour le salut de notre chere
France, de notre Patrie bien-aimee. Je suis heureux infiniment de
pouvoir, presentement, faire ce que le devoir me trace. Je suis
infiniment heureux de pouvoir, a l'epoque actuelle, me battre pour une
noble cause.
Deux honneurs au lieu d'un: defendre sa Patrie et combattre pour les
principes sacres et intangibles de la liberte et de la justice.
Ne devons-nous pas remercier Dieu de l'occasion qu'i
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