laquelle etaient cites ces beaux vers de Musset:
"L'honneur est un apprenti, la douleur est son maitre.
Et nul ne se connait tant qu'il n'a pas souffert."
Nous les avons analyses ensemble a l'epoque ou nous etions reellement
heureux et souvent maintenant dans la dure epreuve je me les rappelle et
toujours ils me reconfortent. Oui, mon pauvre vieux, j'ai souffert et
souvent le decouragement et la maladie auraient pu s'emparer de moi,
mais je ne suis pas seul, je suis grade et moi, encore enfant, je suis
responsable a tous les points de vue de l'existence de cinquante hommes,
malheureusement presque tous peres de famille. C'est pour cela que je
suis fort et que la maladie n'aura pas de prise sur moi.
Il en est de meme pour toi, ne te decourage pas et continue tes etudes
jusqu'a l'heure ou la France t'appellera d'elle-meme pour la servir.
Je ne veux pas dire par la de delaisser les plaisirs, non, loin de la,
chaque chose a son temps.
Depuis que je t'ai ecrit, j'ai voyage; j'ai traverse la France et j'ai
vu presque tout le front. Je suis parti de la Marne, je suis alle a
Paris, j'ai ete dans l'Oise, a cote de Soissons; j'ai ete a l'attaque
du saillant de Quenneviere. Je suis alle dans la Somme, dans le
Pas-de-Calais, du cote d'Arras, et me voila de nouveau dans la Marne. Eh
bien, j'ai toujours ete d'egale humeur, aussi gai le jour ou j'ai pris
le boyau de Quenneviere que le jour ou j'etais a l'arriere, a cote
d'Amiens, a m'amuser avec des camarades. Tu vois que ce n'est qu'une
affaire de volonte et celui qui veut peut.
Tu n'as qu'a reagir, mon cher Henri, et si tu as quelque chose,
dis-le-moi, tu me feras plaisir.
Avec toute l'affection que j'ai pour toi, ton camarade qui t'aime bien.
Ecris-moi vite. Je suis propose pour sous-lieutenant.
Ton vieux,
P.-A. FILIPPINI.
_Lettre ecrite par Guy DE BOYER DE FONS-COLOMBE, 303e Regiment
d'Infanterie, tombe a l'attaque de Vermandouillers, le 4 Septembre
1916._
3 Septembre 1916.
Ma chere petite Maman,
Helas! vous pleurerez en lisant ces lignes: votre fils sera mort pour
la France, Dieu l'aura voulu ainsi et surement pour son bien. Ma chere
maman, je veux une derniere fois vous ecrire combien je vous aime; mon
grand chagrin en pensant a ma mort est de penser a votre peine, pauvre
chere maman; je ne serai plus la pour soutenir tant d'esperances, mais
je serai la-haut aupres de mon pere et nous nous retrouverons. La
vie eternelle est tout! Je sais com
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