ue nous irons rapidement. J'espere que vous allez revenir
a Jugazan, si toutefois vous n'y etes pas quand cette lettre vous
parviendra. Je serais bien heureux qu'Amelie reste le plus longtemps
possible chez elle; je suis bien sur qu'elle a du trouver les vendanges
longues quoique n'en ayant jamais parle. Vous ne semerez probablement
pas a la Clotte, vous n'avez donc pas besoin d'elle la-bas.
Encouragez-la a rester chez elle le plus longtemps possible; je
suis bien sur que vous lui ferez bien plaisir et a moi aussi; c'est
actuellement la chose seule qui me tracasse, elle n'ose rien dire, j'en
suis bien sur, mais elle serait bien heureuse, ses parents aussi; de
deux enfants ils n'en ont plus aucun; vous souffrez aussi, mais si le
sort veut que mon tombeau soit en Lorraine, vous avez quatre enfants,
il vous en restera quatre, au lieu d'avoir deux garcons et deux filles,
vous aurez trois filles et un garcon, vous aurez le meme nombre de
coeurs pour vous aimer et vous soigner, a ma mere et a vous dans vos
vieux jours; pensez donc a ceux qui sont aupres de vous, rendez-leur
autant que possible la vie douce; je ne crois pas un seul instant qu'il
en soit autrement; quant a moi, advienne que pourra, je suis la pour
une noble cause, je ferai mon devoir facilement, le votre est plus
difficile, je compte sur vous....
Bien des baisers a tous.
JEAN.
_P.-S._--Inutile de montrer cette lettre a Amelie.
_Lettre ecrite par Pierre PELERIN, 36e Regiment d'Infanterie, blesse
mortellement, a Neuville-Saint-Vaast, le 3 Juin 1915._
Abbeville, 5 Juin 1915.
Ma chere Tante,
Enfin! ca y est, j'ai paye mon tribut a la Patrie et je vais me reposer
un peu. Je suis blesse d'un eclat de grenade a l'epaule droite et j'ai
ete envoye a l'arriere.
Je t'ecris a toi directement pour que tu puisses prevenir maman et
surtout qu'elle ne se fasse pas trop de soucis.
Je vous embrasse tous, tous, tous, de tout coeur, comme je vous aime.
PIERRE.
_Dernieres lettres ecrites par le Soldat Louis-Joseph PENEL, du 174e
Regiment d'Infanterie, 3e Bataillon, decede a l'ambulance 9/21._
_Ces deux lettres furent ecrites le meme soir et envoyees a la famille,
sur le desir du mourant, a vingt-quatre heures d'intervalle._
10 Septembre 1918.
Ma chere Caroline,
Vous avez du etre bien etonnes en recevant la lettre que j'ai envoyee il
y a trois jours a Antoinette. Je parlais de la vue; pour le moment, il
n'en est plus question. Les gaz m
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