soit vide ou que ses habitants aient peur, il
n'est fait nulle reponse; la porte en est etroite et massive et on ne
peut l'enfoncer; nous nous dirigeons vers une autre maison, ou le
souvarys vient de deceler, filtrant a travers une jointure de volet, un
rayon de lumiere; il frappe, cogne, crie, hurle; finalement, il explique
qui nous sommes et ce que nous demandons. Alors une minuscule fenetre
tout en haut du toit s'ouvre; toute lumiere eteinte, une voix d'homme
se fait entendre et l'on parlemente; il faut expliquer combien nous
sommes, ce que nous faisons, quelles sont nos intentions. Enfin, apres
maintes explications, on consent a nous recevoir; des pas d'hommes se
font entendre a l'interieur, c'est tout un remue-menage avant d'ouvrir,
nous apercevons aux jointures des fenetres qu'on allume des lumieres; a
la fin, d'enormes verrous tires, la porte du bas s'ouvre devant un homme
arme; on entre dans les ecuries qui tiennent le rez-de-chaussee; en haut
de l'escalier qui monte au premier et unique etage, d'autres hommes se
tiennent et nous observent; quand tous les trois nous avons penetre dans
la chaumiere, la porte se referme et nos hotes paraissent tranquillises.
* * * * *
Nous sommes dans le village de Prienze (denomme Brinjas ou Prenjs sur la
carte autrichienne) et le paysan qui est notre hote nous dit s'appeler
Kerine Karique. L'escalier par lequel nous sommes montes separe la piece
des hommes et celle des femmes. On nous conduit dans la premiere, ou
cinq Albanais se trouvent. Ils voient notre etat: nos vetements
degouttent d'eau et nous paraissons transis de froid; aussitot l'un
d'eux attise l'atre qui mourait; un autre prepare le cafe; le chef passe
au haremlik et revient bientot avec des chemises et des pantalons de
flanelle blanche pour nous permettre de faire secher nos vetements; on
entasse des tapis au coin de la cheminee et nos hotes nous
confectionnent un immense plat d'oeufs pimentes qui avec le cafe
finissent de nous rechauffer; tandis que nous reparons ainsi la fatigue
de seize heures de chemin, les Albanais s'appretent au sommeil; a cote
de moi, un vieux paysan commence une interminable priere qu'il
bredouille a mi-voix et qu'il coupe d'interjections en baisant la terre
a mes pieds; puis il s'etend sur le sol et s'endort.
Pendant ce temps, j'observe la chaumiere: c'est une construction
quadrangulaire tres simple, aux murs d'une epaisseur extreme; le
rez-de-chaussee e
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