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semblable a un montagnard catholique de Mirditie qu'un habitant musulman
de Liouma, ou a un bey catholique de Scutari qu'un bey musulman de
Tirana.
En verite, l'obstacle qui s'opposera a l'organisation politique en
Albanie sera surtout ce que l'on a appele l'anarchie albanaise; a bien
examiner les choses, il faut remplacer le mot "anarchie" par celui
d'organisation sociale aujourd'hui inconnue dans le monde moderne.
Prenez une carte de l'Albanie autonome: un peu plus d'un tiers du pays
en etendue n'obeit qu'aux chefs de village; on peut delimiter cette
region en tracant une ligne depuis la nouvelle frontiere vers le lac de
Scutari, au nord de la ville du meme nom, jusqu'au lac d'Okrida; cette
ligne laisserait au sud les villes d'Alessio, Kroia, Tirana, El-Bassam;
le massif des montagnes du nord compris entre cette ligne et la
frontiere, comme d'ailleurs la region de Dibra, aujourd'hui en Serbie,
est habite par des tribus qui en sont a l'etat social des clans gaulois
au temps de Vercingetorix. Quant a la region des montagnards
catholiques, de Scutari a Alessio et Kroia, elle est a peine differente;
toutefois, deux autorites centrales y subsistent, celle du prince des
Mirdites et celle du pouvoir religieux. La situation est a peu pres la
meme dans les montagnes entre Berat, El-Bassam et le lac d'Okrida, et
meme, d'une maniere generale, dans toutes les regions montagneuses
d'Albanie.
Dans l'ensemble, cette partie du pays n'a jamais reconnu l'autorite
souveraine du Sultan, mais seulement son autorite religieuse. Elle est
divisee, de temps immemorial, en confederations; mais aucune de ces
confederations, sauf celle des Mirdites, n'obeit a un pouvoir central et
ce n'est que dans les cas graves et contre l'envahisseur que les clans
s'unissent et nomment un chef qui les menera a la bataille. En temps
ordinaire, les seules autorites reconnues jusqu'ici etaient donc celles
des chefs de village; les montagnards ne payaient pas l'impot et ne
faisaient de service militaire que comme volontaires ou en cas de guerre
sainte.
Le reste du pays se trouvait a un stade un peu plus avance de
l'evolution sociale; il en etait a la fin du regime feodal et payait
l'impot d'argent et l'impot du sang au souverain et en meme temps au
seigneur feodal ou bey.
Enfin les villes de la cote, Scutari, Durazzo, Vallona, ont des
analogies avec les villes et ports marchands du moyen age, ou les
commercants ont impose des regles et des cout
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