pleine d'embuches ne seront pas un des moindres facteurs de la reussite
ou de l'insucces de l'operation.
En tout cas le prince de l'Albanie, qui a pour mission de creer un Etat
et de developper les ressources naturelles du pays, commettrait la plus
grave erreur en pretendant y transplanter tout d'un coup les
institutions politiques en faveur au XXe siecle.
Si l'on veut tenter quelque organisation serieuse en Albanie, qu'on ne
commence pas par y constituer, comme on l'a fait a Vallona, une
caricature de regime parlementaire avec chambre, senat et ministere
pretendu responsable. L'Albanie a besoin d'organisateurs, non
d'orateurs; il y a une rade et dure besogne a y accomplir; les phrases
n'y suffisent pas; le regime parlementaire repond a un autre etat
d'esprit et a d'autres besoins; quand les cadres d'une societe sont
anciens et solides, les esprits cultives et critiques, la richesse
generale, l'organisation sociale assise, la direction gouvernementale
marche par la force des traditions et de la bureaucratie; les disputes
et les discours du parlement n'ont qu'une influence reduite sur la
societe et l'organisme gouvernemental; leur influence corrosive perd de
son venin; par contre, ces institutions donnent des garanties a la
liberte individuelle contre les abus du pouvoir.
Mais, dans un pays ou tout est a creer, ou il faut faire un Etat, mettre
debout des cadres et des hierarchies, ou il faut en un mot organiser, il
convient de laisser de cote les discours et les parlements. Il faut se
rendre compte qu'un des vices profonds du regime parlementaire, qui
comme tout regime a son revers, est la confusion qu'il etablit entre le
politique verbeux et l'homme d'Etat: qui ne sait pas parler ne saurait
etre ministre, qui n'est pas orateur n'a pas vocation au commandement.
Or, tout au contraire, il y a de fortes chances pour que le grand
organisateur, l'homme d'Etat de haute envergure ne soit pas un orateur
ou n'aime pas parler; Maeterlinck a ecrit un de ces mots profonds qui
ouvre, comme une pensee de Pascal, des echappees sur l'infini: "Quand
les levres dorment, les ames se reveillent." Qu'est-ce a dire, si ce
n'est que les grands penseurs, les vrais hommes d'Etat, les
intelligences ayant de l'avenir dans l'esprit sont des silencieux; un
Richelieu, un Colbert, un Napoleon auraient peu goute la reunion
publique ou la tribune parlementaire; la grande faiblesse du regime
moderne de gouvernement est d'ecarter du pouvoir l'organis
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