riage contre
leur inclination; mais voici qu'il faut cohabiter: observons le nouveau
menage.
Une attitude d'observation et d'expectative est la seule, en effet, qui
convienne a notre pays en Albanie. Mais ce desinteressement provisoire
ne doit pas etre un oubli, car d'Albanie peuvent naitre des evenements
susceptibles de modifier a nouveau l'equilibre europeen. L'arbitre de
Berlin au gantelet de fer reussira-t-il toujours a imposer sa decision
en cas de peril? qui peut dire? L'Italie aurait tort de se plaindre de
l'allie allemand, qui lui a donne le temps depuis 1878 de se fortifier
pour parler en egale de l'empire voisin; mais la monarchie
habsbourgeoise peut se croire jouee; Bismarck lui a montre les Balkans
pour la detourner du Nord: son expansion balkanique est arretee, le
commerce allemand y remplace le sien et voici qu'en Albanie c'est
l'autre allie qu'elle rencontre, parce qu'en trente ans la Triple
Alliance a donne a celui-ci le temps de grandir.
Qui peut dire si l'Albanie n'amenera pas le jour ou l'empire allemand
sera incapable de maintenir les deux allies dans l'obedience; ou la paix
sera en danger parce que la Triple Alliance brisee; ou l'un ou l'autre
des deux seconds voudra satisfaire ses ambitions ou liberer sa
politique?
Si ce jour venait, grace a l'Albanie, quelle suite ne pourrait-il pas
avoir dans l'histoire europeenne! Trois attitudes seraient alors
possibles pour notre pays: laisser faire, mais l'arme au bras, toute
modification au _statu quo_ dans l'Europe centrale devenant _casus
belli_; passer des ententes appropriees avec l'Italie; enfin, constituer
avec l'Autriche-Hongrie et la Russie cette ligue des trois grandes
puissances continentales que Bismarck craignait seule au monde.
La situation diplomatique de notre pays serait merveilleuse en pareil
cas, mais encore faut-il voir, prevoir et vouloir et ne pas laisser a
nouveau passer l'heure; si l'affaire d'Albanie devenait jamais une
nouvelle affaire des duches, cette fois italo-autrichienne, ne
recommencons pas l'impardonnable abandon de la diplomatie du second
Empire, faute de courage, d'initiative et de volonte.
Mais ce sont la vues d'un avenir, peut-etre lointain, peut-etre proche;
la rivalite anglo-francaise en Egypte, qui a pese sur l'histoire de
l'Europe depuis le milieu du XIXe siecle, a mis des annees a devenir
aigue; elle n'a pas empeche l'alliance des deux Etats et la guerre de
Crimee, elle est restee latente une trentaine d'a
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