elle m'aidera a
mon ouvrage comme elle faisait souvent autrefois. C'est une bonne fille
qui m'aime bien et qui est vive comme un papillon, douce comme un
enfant, complaisante _comme un ange_. Est-ce que cela vous gene, qu'elle
trotte dans la maison autour de moi? Ca ne vous coutera pas un sou de
plus; c'est moi qu'elle sert, et non pas vous.
Les choses me paraissant arrangees ainsi, il ne me restait qu'a les
accepter dans la mesure ou elles me sembleraient acceptables. Mon
dejeuner me fut servi par la jeune fille, dont la proprete, beaucoup
moins suspecte que celle de sa tante, la vivacite et les delicates
attentions m'eussent ete tres-agreables, si je ne sais quelle mefiance
ne m'eut tenu sur la defensive. Il y avait, dans ses manieres avec
moi, une provocation evidente, mais une provocation tendre et comme
maternelle dont je ne pouvais me defendre d'etre encore plus touche que
flatte. Je resolus d'en avoir le coeur net, et, comme, en se baissant
vers moi pour me servir du cafe, sa joue effleurait la mienne plus que
de raison, je lui donnai de grand coeur le baiser qu'elle semblait
appeler.
Je fus etonne de la voir rougir et frissonner, comme si cette liberte
l'eut prise au depourvu. Je suppose pourtant qu'elle n'est pas grisette,
Italienne et jolie, et qu'elle n'a pas couru le monde deux ans en
qualite de soubrette elegante, sans avoir eu bon nombre d'aventures plus
serieuses. Aussi, pour en finir avec toute comedie de sa part ou de la
mienne, je crus devoir lui poser nettement la question.
--Vous ai-je offensee? lui dis-je en l'attirant pres de moi.
--Non, repondit-elle sans hesiter, et en me caressant de son plus beau
regard.
--Vous ai-je deplu?
--Non.
--Vous me permettrez d'esperer...?
--Tout, si vous m'aimez; rien, si vous ne m'aimez pas.
Cela etait dit si nettement, que j'en fus tout abasourdi.
--Qu'entendez-vous par aimer? repris-je.
--Si vous le demandez, vous ne savez donc pas ce que c'est?
--Je n'ai jamais aime.
--Pourquoi?.......
--Parce que je n'ai rencontre apparemment aucune femme qui me parut
digne d'un amour comme je l'entendais.
--Vous n'avez donc pas cherche?
--L'amour ne se trouve pas en le cherchant. On le rencontre peut-etre au
moment ou l'on ne s'y attend pas.
--Suis-je celle qui vous paraitrait digne de l'amour comme vous
l'entendez?
--Comment le savoir?
--Il y a quinze jours que vous me connaissez!
--Je ne vous connais pas plus que vous ne me conn
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