rentrerent, souleverent le corps de sir John, le poserent
sur un brancard, l'emporterent hors de la chapelle, par la grande
porte d'entree, qu'ils refermerent derriere eux.
Les deux moines qui marchaient devant le brancard avaient pris les
deux dernieres torches.
Et maintenant, si nos lecteurs nous demandent pourquoi cette
difference entre les evenements arrives a Roland et ceux arrives a
sir John; pourquoi cette mansuetude envers l'un, et pourquoi cette
rigueur envers l'autre, nous leur repondrons:
"Souvenez-vous que Morgan avait sauvegarde le frere d'Amelie, et
que, sauvegarde ainsi, Roland, dans aucun cas, ne pouvait mourir
de la main d'un compagnon de Jehu."
XIX: LA PETITE MAISON DE LA RUE DE LA VICTOIRE
Tandis que l'on transporte au chateau des Noires-Fontaines le
corps de sir John Tanlay; tandis que Roland s'elance dans la
direction qui lui a ete indiquee; tandis que le paysan depeche par
lui court a Bourg prevenir le docteur Milliet de la catastrophe
qui rend sa presence necessaire chez madame de Montrevel,
franchissons l'espace qui separe Bourg de Paris et le temps qui
s'est ecoule entre le 16 octobre et le 7 novembre, c'est-a-dire
entre le 24 vendemiaire et le 7 brumaire, et penetrons, vers les
quatre heures de l'apres-midi, dans cette petite maison de la rue
de la Victoire rendue historique par la fameuse conspiration du 18
brumaire, qui en sortit tout armee.
C'est la meme qui semble etonnee de presenter encore aujourd'hui,
apres tant de changements successifs de gouvernements, les
faisceaux consulaires sur chaque battant de sa double porte de
chene et qui s'offre -- situee au cote droit de la rue, sous le
numero 60 -- a la curiosite des passants.
Suivons la longue et etroite allee de tilleuls qui conduit de la
porte de la rue a la porte de la maison; entrons dans
l'antichambre; prenons le couloir a droite, et montons les vingt
marches qui conduisent a un cabinet de travail tendu de papier
vert et meuble de rideaux, de chaises, de fauteuils et de canapes
de la meme couleur.
Ses murailles sont couvertes de cartes geographiques et de plans
des villes; une double bibliotheque en bois d'erable s'etend aux
deux cotes de la cheminee, qu'elle emboite; les chaises, les
fauteuils, les canapes, les tables et les bureaux sont surcharges
de livres; a peine y a-t-il place sur les sieges pour s'asseoir,
et sur les tables et les bureaux pour ecrire.
Au milieu d'un encombrement de rapports, de lettres,
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