t curiosite les
inscriptions tracees dans la galerie, etaient plusieurs habitants de la
petite ville de Blere, situee a une lieue de Chenonceaux. Toujours bien
recus par la comtesse, ils avaient amene deux jeunes filles, modestement
vetues, et dont l'exterieur annoncait une honnete obscurite. Elles
prenaient au crayon des notes, et semblaient recueillir quelques
renseignements historiques. Elles avaient signe sur le registre: Cecile
et Suzanne de La Tour, filles de militaire et natives de Nancy. Le
general et ses enfants avaient passe plusieurs fois devant elles sans
les remarquer. Leur exterieur etait si mince, et leurs yeux baisses,
leur maintien gene, timide, annoncaient qu'elles avaient si peu
d'usage!... Elles suivirent toutefois les visiteurs, et furent admises
dans le salon bleu, qu'elles n'etaient pas moins impatientes que les
autres de connaitre et d'etudier. Humblement retirees dans un coin,
et restant debout, elles contemplaient avec un interet devorant les
portraits offerts a leurs regards, et pretaient une oreille attentive a
tout ce que disaient les differentes personnes admises comme elles
dans ce riche salon. Elles ne tarderent pas a s'apercevoir que les deux
filles du general parlaient avec pretention sur les personnages les plus
celebres composant cette imposante reunion, et qu'elles affectaient
d'etaler un grand savoir. Plus d'une fois meme, en parlant avec une
volubilite qui prouvait combien elles etaient peu versees dans la
science de l'histoire, elles portaient sur Cecile et Suzanne un regard
qui semblait dire: "Pauvres petites, vous ne pouvez pas nous comprendre,
et tout votre merite se borne sans doute au travail de l'aiguille." Les
deux jeunes soeurs baissaient alors leurs grands yeux observateurs, et
leur rougeur confirmait, en apparence, tout ce que pensaient d'elles les
deux demoiselles si vaines de leur erudition.
Mais quelques anachronismes qui echapperent a celles-ci, quelques
erreurs sur le caractere et les hauts faits des grands personnages
contemporains de Francois 1er amenerent une scene tres-remarquable, et
prouverent que l'on s'expose a d'etranges deconvenues lorsqu'on a la
manie de citer a tort et a travers, et de montrer son savoir, le vrai
merite s'enveloppant toujours du voile de la modestie.
Un des portraits les plus remarquables etait celui de Francois 1er, par
Le Titien. A cette belle figure franche, ouverte, a ce sourire gracieux,
chacun avoue que la couronne de France ne
|