ut toujours croire, comme nous l' dit not' bon pasteur,
qu' les maux dont il nous frappe sont une expiation d' nos fautes, et
l'assurance d'un meilleur sort dans l'autre monde."
Les deux jeunes soeurs furent touchees de la pieuse resignation de la
veuve; et, apres l'avoir aidee aux soins de son petit menage, elles
s'eloignerent en regardant a plusieurs reprises la venerable infirme,
qui suivit de ses yeux reconnaissants les deux anges que le ciel avait
envoyes a son secours, jusqu'a ce qu'elle les eut tout-a-fait perdus de
vue.
Le lendemain matin, pendant que leur famille reposait encore au chateau,
Celine et Louisa, escortees de leur fidele gouvernante, se rendirent a
la chaumiere de la veuve, qu'elles trouverent levee et faisant sa priere
a Dieu, comme si elle eut ete comblee de ses benedictions. Pendant
que la gouvernante fait le lit de la mere Durand, les deux jeunes
demoiselles s'empressent d'aider cette derniere a se vetir, et lui
preparent un dejeuner frugal, mais stomachique, avec du vin vieux,
du sucre et un petit pain qu'elles avaient apporte. On eut dit la
respectable aieule des deux charmantes creatures dont elle etait
entouree. L'une frotte avec un liniment salutaire le bras de la vieille,
qui s'imagine que son sang circule de nouveau sous la main douce et
bienfaisante qui la caresse; l'autre allume du feu avec deux vieux
tisons qui, par hasard, se trouvaient encore dans la cheminee, et
chauffe un morceau de flanelle dont elle fait une friction, qui, peu
a peu, fait penetrer dans le membre engourdi de la malade une chaleur
vivifiante, et lui permet de remuer un peu les doigts, ce qu'elle
n'avait pu faire depuis longtemps. Enfin, tous ces devoirs de la charite
etant remplis, on s'occupe a devider quelques echeveaux de soie que
plusieurs fabricants de la ville confiaient encore a cette pauvre veuve.
Celine, Louisa et leur gouvernante, chacune un devidoir devant elles,
agitent vivement une bobine qui se remplit de soie, et se font diriger
dans cet essai par la mere Durand, souriant au zele de ses trois
apprenties.
Le plus grand secret avait ete recommande a la bonne vieille, et,
pendant tout le mois de juin et la moitie de juillet, eut lieu, des le
lever du soleil, ce pieux pelerinage a la chaumiere de la veuve, dont on
fermait la porte avec soin. Ce n'etait que vers dix heures, au moment ou
la cloche du chateau sonnait le dejeuner, qu'on y remontait a la hate,
et qu'on paraissait avoir fait la promenade
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