pres de son illustre compatriote, il composa des vers
et les lui adressa; il eut soin d'y joindre un petit billet _qu'il fit
le plus cavalier possible_, comme il l'ecrivit depuis a M. Viguier, de
peur que le grand poete ne crut voir arriver un rimeur bien pedant, bien
humble et bien vain. L'accueil de Lamartine et son jugement favorable
encouragerent Farcy a continuer ses essais poetiques. Il composa donc
plusieurs pieces de vers durant son sejour a Ischia; il les envoyait
en France a son excellent ami M. Viguier, qu'il avait eu pour maitre a
l'Ecole normale, reclamant de lui un avis sincere, de bonnes et franches
critiques, et, comme il disait, _des critiques antiques avec le mot
propre sans periphrase_. Pour exprimer toute notre pensee, ces vers de
Farcy nous semblent une haute preuve de talent, comme etant le produit
d'une puissante et riche faculte tres-fatiguee, et en quelque sorte
epuisee avant la production: on y trouve peu d'eclat et de fraicheur;
son harmonie ne s'exhale pas, son style ne rayonne pas; mais le
sentiment qui l'inspire est profond, continu, eleve; la faculte
philosophique s'y manifeste avec largeur et mouvement. L'impression qui
resulte de ces vers, quand on les a lus ou entendus, est celle d'un
stoicisme triste et resigne qui traverse noblement la vie en contenant
une larme. Nous signalons surtout au lecteur la piece adressee a un ami
victime de l'amour; elle est sublime de gravite tendre et d'accent a la
fois viril et emu. Dans la piece a madame O'R...., alors enceinte, on
remarquera une strophe qui ferait honneur a Lamartine lui-meme: c'est
celle ou le poete, s'adressant a l'enfant qui ne vit encore que pour sa
mere, s'ecrie:
Tu seras beau; les Dieux, dans leur magnificence,
N'ont pas en vain sur toi, des avant ta naissance,
Epuise les faveurs d'un climat enchante;
Comme au sein de l'artiste une sublime image,
N'es-tu pas ne parmi les oeuvres du vieil age?
N'es-tu pas fils de la beaute?
Ce que nous disons avec impartialite des vers de Farcy, il le sentit
lui-meme de bonne heure et mieux que personne; il aimait vivement
la poesie, mais il savait surtout qu'on doit ou y exceller ou s'en
abstenir: "Je ne voudrais pas, ecrivait-il a M. Viguier, que mes vers
fussent de ceux dont on dit: _Mais cela n'est pas mal en verite!_ et
qu'on laisse la pour passer a autre chose." Sans donc renoncer, des le
debut, a cette chere et consolante poesie, il ne s'empressa aucunement
de s'y livrer tou
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