er souffle.
Lorsqu'il s'etait decide a s'adresser a Glady, il avait hesite
entre celui-ci et un usurier appele Caffie qu'il ne connaissait pas
personnellement, mais dont il avait souvent entendu parler comme d'un
vrai coquin s'occupant de toute sorte d'affaires, des mauvaises de
preference aux bonnes, de successions, de mariages, d'interdictions, de
chantages; et, s'il n'avait-point ete a lui, c'etait autant par crainte
d'etre refuse que par peur de se mettre dans de pareilles mains, au cas
ou elles voudraient bien l'accepter. Mais ces scrupules et ces craintes
n'etaient plus de saison: puisque Glady lui manquait, coute que coute
et quoi qu'il put en advenir, il fallait bien se retourner du cote du
coquin.
Il savait que Caffie demeurait rue Sainte-Anne, mais il ignorait son
numero: il n'eut qu'a entrer chez un de ses clients, marchand de vin,
rue Therese, pour le trouver en consultant le _Bottin_. C'etait a
deux pas; et tout de suite il decida de risquer l'aventure; l'affaire
pressait. Decourage par toutes les demarches qu'il avait essayees
jusqu'a ce jour, rebute par les espoirs trahis, irrite par les
rebuffades recues, il ne s'abusait pas sur les chances de cette derniere
tentative, mais enfin il devait la faire, si peu solides que fussent ces
chances.
C'etait une vieille maison de la butte des Moulins qu'habitait Caffie et
qui, autrefois, avait du etre un hotel particulier: elle se composait
de deux corps de batiment, l'un sur la rue, l'autre sur une cour
interieure. Une porte cochere donnait acces dans cette cour, et sous
sa voute, apres un escalier, se trouvait la loge du concierge. Ce fut
vainement que Saniel frappa a cette porte: fermee a clef, elle ne
s'ouvrit point; il dut attendre quelques instants et, dans son
impatience nerveuse, il se mit a marcher en long et en large dans la
cour. Enfin, une vieille femme cassee et voutee parut, un rat-de-cave a
la main, et s'excusa: seule, elle ne pouvait pas etre partout en meme
temps, a garder sa loge et a allumer dans l'escalier de la proprietaire.
C'etait au premier etage que demeurait Caffie, dans le corps de batiment
sur la rue.
Saniel monta au premier et sonna; un temps assez long, ou tout au moins
qui parut tres long a son inquietude, s'ecoula avant qu'on lui repondit;
a la fin, il entendit un pas lent et trainant sur le carreau, et la
porte s'entr'ouvrit, mais retenue par la main et par le pied:
--Qui demandez-vous?
--M. Caffie.
--C'est moi. Qui
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