rrons, messieurs, et prions le ciel qu'il fasse
ingrats ceux auxquels nous nous devouons, et nous aurons, croyez-
moi, la belle part dans l'histoire de nos guerres civiles.
A peine Morgan achevait-il de formuler cet axiome chevaleresque et
exprimait-il un souhait qui avait toute chance d'etre accompli,
que trois coups maconniques retentirent a la meme porte par
laquelle il avait ete introduit lui-meme.
-- Messieurs, dit celui des moines qui paraissait remplir le role
de president, vite les capuchons et les masques; nous ne savons
pas qui nous arrive.
VIII -- A QUOI SERVAIT L'ARGENT DU DIRECTOIRE
Chacun s'empressa d'obeir, les moines rabattant les capuchons de
leurs longues robes sur leurs visages, Morgan remettant son
masque.
-- Entrez! dit le superieur.
La porte s'ouvrit et l'on vit reparaitre le frere servant.
-- Un emissaire du general Georges Cadoudal demande a etre
introduit, dit-il.
-- A-t-il repondu aux trois mots d'ordres?
-- Parfaitement.
-- Qu'il soit introduit.
Le frere servant rentra dans le souterrain, et, deux secondes
apres, reparut, conduisant un homme qu'a son costume il etait
facile de reconnaitre pour un paysan, et a sa tete carree, coiffee
de grands cheveux roux, pour un Breton.
Il s'avanca jusqu'au milieu du cercle sans paraitre intimide le
moins du monde, fixant tour a tour ses yeux sur chacun des moines
et attendant que l'une de ces douze statues de granit rompit le
silence.
Ce fut le president qui lui adressa la parole:
-- De la part de qui viens-tu? lui demanda-t-il.
-- Celui qui m'a envoye, repondit le paysan, m'a commande, si l'on
me faisait une question, de dire que je venais de la part de Jehu.
-- Es-tu porteur d'un message verbal ou ecrit?
-- Je dois repondre aux questions qui me seront faites par vous et
echanger un chiffon de papier contre de l'argent.
-- C'est bien; commencons par les questions: ou en sont nos freres
de Vendee?
-- Ils avaient depose les armes et n'attendaient qu'un mot de vous
pour les reprendre.
-- Et pourquoi avaient-ils depose les armes?
-- Ils en avaient recu l'ordre de S. M. Louis XVIII.
-- On a parle d'une proclamation ecrite de la main meme du roi.
-- En voici la copie.
Le paysan presenta le papier au personnage qui l'interrogeait.
Celui-ci l'ouvrit et lut:
"La guerre n'est absolument propre qu'a rendre la royaute odieuse
et menacante. Les monarques qui rentrent par son secours sanglant
ne peuvent ja
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