e commencement, profondement endormie.
--Admirable effet de l'harmonie! pensai-je. O Marais! o ecuelle
maternelle! plus que jamais je reviens a vous!
Au moment ou je m'elancais pour partir, la tourterelle rouvrit les yeux.
--Adieu, dit-elle, etranger si gentil et si ennuyeux! Mon nom est
Gourouli; souviens-toi de moi!
--Belle Gourouli, lui repondis-je, vous etes bonne, douce et charmante;
je voudrais vivre et mourir pour vous. Mais vous etes couleur de rose;
tant de bonheur n'est pas fait pour moi!
IV
Le triste effet produit par mon chant ne laissait pas que de
m'attrister.--Helas! musique, helas! poesie, me repetais-je en regagnant
Paris, qu'il y a peu de coeurs qui vous comprennent!
En faisant ces reflexions, je me cognai la tete contre celle d'un oiseau
qui volait dans le sens oppose au mien. Le choc fut si rude et si
imprevu, que nous tombames tous deux sur la cime d'un arbre qui, par
bonheur, se trouva la. Apres que nous nous fumes un peu secoues, je
regardai le nouveau venu, m'attendant a une querelle. Je vis avec
surprise qu'il etait blanc. A la verite, il avait la tete un peu plus
grosse que moi, et, sur le front, une espece de panache qui lui donnait
un air heroi-comique; de plus, il portait sa queue fort en l'air, avec
une grande magnanimite: du reste, il ne me parut nullement dispose a la
bataille. Nous nous abordames fort civilement, et nous nous fimes de
mutuelles excuses, apres quoi nous entrames en conversation. Je pris la
liberte de lui demander son nom et de quel pays il etait.
--Je suis etonne, me dit-il, que vous ne me connaissiez pas. Est-ce que
vous n'etes pas des notres?
--En verite, monsieur, repondis-je, je ne sais pas desquels je suis.
Tout le monde me demande et me dit la meme chose; il faut que ce soit
une gageure qu'on ait faite.
--Vous voulez rire, repliqua-t-il; votre plumage vous sied trop bien
pour que je meconnaisse un confrere. Vous appartenez infailliblement a
cette race illustre et venerable qu'on nomme en latin _cacuata_, en
langue savante _kakatoes_, et en jargon vulgaire catacois.
--Ma foi, monsieur, cela est possible, et ce serait bien de l'honneur
pour moi. Mais ne laissez pas de faire comme si je n'en etais pas, et
daignez m'apprendre a qui j'ai la gloire de parler.
--Je suis, repondit l'inconnu, le grand poete Kacatogan. J'ai fait de
puissants voyages, monsieur, des traversees arides et de cruelles
peregrinations. Ce n'est pas d'hier que je rim
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