ine de grace dans tous ses mouvements,
d'esprit et quelquefois d'energie dans sa petite pantomime,
singulierement industrieuse a se faire entendre, vive a comprendre,
toujours obeissante des qu'elle avait compris. Le chevalier restait
aussi parfois, comme madame des Arcis, a regarder sa fille sans parler.
Tant de grace et de beaute, joint a tant de malheur et d'horreur, etait
pres de lui troubler l'esprit; on le vit embrasser souvent Camille avec
une sorte de transport, en disant tout haut:--Je ne suis cependant pas
un mechant homme!
Il y avait une allee dans le bois, au fond du jardin, ou le chevalier
avait l'habitude de se promener apres le dejeuner. De la fenetre de sa
chambre, madame des Arcis voyait son mari aller et venir derriere les
arbres. Elle n'osait guere l'y aller retrouver. Elle regardait, avec un
chagrin plein d'amertume, cet homme qui avait ete pour elle plutot un
amant qu'un epoux, dont elle n'avait jamais recu un reproche, a qui elle
n'en avait jamais eu un seul a faire, et qui n'avait plus le courage de
l'aimer parce qu'elle etait mere.
Elle se hasarda pourtant un matin. Elle descendit en peignoir, belle
comme un ange, le coeur palpitant; il s'agissait d'un bal d'enfants qui
devait avoir lieu dans un chateau voisin. Madame des Arcis voulait y
mener Camille. Elle voulait voir l'effet que pourrait produire sur le
monde et sur son mari la beaute de sa fille. Elle avait passe des nuits
sans sommeil a chercher quelle robe elle lui mettrait; elle avait forme
sur ce projet les plus douces esperances.--Il faudra bien, se
disait-elle, qu'il en soit fier et qu'on en soit jaloux, une fois pour
toutes, de cette pauvre petite. Elle ne dira rien, mais elle sera la
plus belle.
Des que le chevalier vit sa femme venir a lui, il s'avanca au-devant
d'elle, et lui prit la main, qu'il baisa avec un respect et une
galanterie qui lui venaient de Versailles, et dont il ne s'ecartait
jamais, malgre sa bonhomie naturelle. Ils commencerent par echanger
quelques mots insignifiants, puis ils se mirent a marcher l'un a cote de
l'autre.
Madame des Arcis cherchait de quelle maniere elle proposerait a son mari
de la laisser mener sa fille au bal, et de rompre ainsi une
determination qu'il avait prise depuis la naissance de Camille, celle
de ne plus voir le monde. La seule pensee d'exposer son malheur aux yeux
des indifferents ou des malveillants mettait le chevalier presque hors
de lui. Il avait annonce formellement sa volon
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