atin, par la premiere distribution, elle recut la reponse
qu'elle attendait.
Avec sa regularite habituelle, Duvau s'etait conforme aux instructions
qu'il avait recues: sous la meme enveloppe se trouvaient la lettre a
lord Harley et celles de madame Pretavoine.
La lettre adressee a lord Harley n'etant pas cachetee, madame Pretavoine
l'ouvrit, mais sans pouvoir la lire, puisqu'elle ne savait pas
l'anglais; cependant, en l'examinant et en la tournant entre ses doigts,
elle remarqua que Duvau avait ecrit mylord en deux mots: My Lord; et sur
l'adresse elle remarqua aussi un changement; au lieu de mylord Harley:
il y avait The Right hon. Lord Harley.
Et alors elle s'applaudit d'avoir eu recours a Duvau, car pleine de
confiance en lui, elle se dit que c'etait ainsi sans doute que les
choses devaient se faire. Sa lettre paraitrait ecrite par un Anglais, et
avec la precaution qu'elle avait eu le soin de prendre, de parler au nom
de l'amitie, il n'y avait guere a craindre que les soupcons arrivassent
jusqu'a elle. Lord Harley chercherait parmi ses amis celui qui aurait pu
lui ecrire cette lettre, et jamais l'idee ne viendrait a personne que
c'etait elle, madame Pretavoine. Pourquoi l'eut-elle ecrite? Dans quel
but! On ne le connaissait pas, ce but. Comment supposer qu'il y avait
quelqu'un qui avait interet a amener une rupture entre lord Harley
et madame de la Roche-Odon, afin d'obtenir de celle-ci, reduite a la
misere, de consentir au mariage de sa fille? On n'imagine pas facilement
des combinaisons si compliquees; on va au plus pres; et dans ces
circonstances, le plus pres c'etait quelque rivalite, quelque jalousie
de femme a propos de ce chanteur.
Persuadee qu'Emma ecrirait a Rosa Zampi, madame Pretavoine n'avait eu
garde de retourner chez la vicomtesse; malgre tout le desir et toute
l'impatience qu'elle avait d'etre fixee a ce sujet, il fallait eviter
qu'on put constater qu'elle avait cherche a savoir si Rosa avait ete
prevenue.
D'ailleurs, alors meme que celle-ci ne l'aurait pas ete, ce qui n'etait
guere probable, cela n'empecherait pas lord Harley de surprendre Cerda
en tete-a-tete avec madame de la Roche-Odon, et c'etait deja un assez
bon resultat pour qu'on lui envoyat la lettre de Duvau.
Elle cacheta donc cette lettre, et elle la porta elle-meme a la poste
de la piazza Colonna; si lord Harley ne la recevait pas le soir, il la
recevrait au moins le lendemain dimanche, et il aurait tout le temps
necessaire pou
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