r venir a Rome le lundi soir.
Elle attendit le lundi soir avec une fievreuse impatience, et de bonne
heure elle se retira dans sa chambre disant a la soeur Sainte-Julienne,
ainsi qu'a Aurelien, qu'elle desirait se coucher.
Mais au lieu de se coucher, elle atteignit un grand manteau noir a
capuchon et l'ayant dispose sur une table, elle souffla la lumiere.
Puis cela fait, elle s'installa dans un fauteuil et resta la immobile,
comptant les heures de sa pendule qui resonnaient dans le silence de la
nuit.
Lorsque la demie sonna apres onze heures, elle endossa vivement son
manteau mais sans faire de bruit, et sortant a pas glisses elle
descendit, au grand etonnement de mademoiselle Bonnefoy la jeune, qui
n'etait point encore couchee.
--Etes-vous donc indisposee? demanda mademoiselle Bonnefoy.
La question n'etait peut-etre pas en situation, car si madame Pretavoine
avait ete indisposee, elle ne serait pas sortie a onze heures et demie;
mais comme mademoiselle Bonnefoy n'osait pas demander franchement:
"Ou allez-vous en pareille heure?" elle se servait de la question qui
s'offrait a son esprit.
--Non, pas du tout; je vous remercie, repondit madame Pretavoine.
Et, sans en dire davantage, elle sortit vivement.
De la place Barberini a la via Gregoriana, la course n'est pas longue;
en peu de minutes, madame Pretavoine arriva devant la maison de madame
de la Roche-Odon.
Les fenetres de l'appartement de la vicomtesse etaient eclairees, et par
les fentes des rideaux on apercevait des jets de lumiere; c'etait la un
signe favorable: evidemment Cerda etait attendu.
Comme madame Pretavoine ne pouvait pas s'etablir en faction devant cette
maison, elle s'eloigna de quelques pas, marchant le long des murs,
enveloppee dans son manteau, la tete si bien cachee dans son capuchon
qu'il aurait fallu braquer une lanterne en plein visage pour la
reconnaitre.
La rue d'ailleurs etait deserte, et comme il n'y avait pas de lune au
ciel, elle se trouvait assez mal eclairee par le gaz qui laissait ca
et la des places dans l'ombre; c'etait dans cette ombre que se tenait
madame Pretavoine, ralentissant alors le pas et ne l'allongeant que
lorsqu'elle recevait en plein la lumiere.
Une autre femme eut pu avoir peur dans cette rue silencieuse et deserte,
mais c'etait un sentiment que madame Pretavoine ne connaissait pas quand
elle n'avait pas des grosses sommes d'argent ou des valeurs sur elle.
C'etait meme parce qu'elle etait bi
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