ne fallait pas jouer.
--Il me fallait au contraire jouer, et, ayant perdu, il me fallait
payer, ceci devrait etre compris et non demande.
Il lanca ces quelques paroles a la face de sa mere; puis, continuant
avec une violence qui a chaque mot allait croissant:
--Si j'avais eu mon patrimoine, j'aurais pris dessus l'argent necessaire
pour soutenir cette lutte. Mais qu'est-il devenu? A qui la faute si j'ai
fait arme de tout? Donc, pas de reproches.
--Des reproches!
--Pas d'accusation; chacun a ses vices, et ce n'est que justice d'etre
indulgent les uns pour les autres.
Madame de la Roche-Odon s'etait affaissee dans son fauteuil, car chacune
de ces paroles l'avait atteinte en plein corps.
Dans leur forme vague elles etaient pour elle d'une terrible precision,
et il n'etait rien de ce qu'il avait voulu dire, qu'elle n'eut compris.
Ce justicier c'etait son fils, son fils faussaire, rejetant sur elle une
part de son crime.
--Pourquoi ai-je joue?
--Pour qui?
--Pourquoi n'ai-je pas paye?
Les reponses a ces horribles questions elle les trouvait en elle.
Elle leva ses deux mains pour cacher son visage, mais dans ce moment ses
yeux rencontrerent le visage extatique de madame Pretavoine.
Elle avait oublie qu'ils n'etaient pas seuls; il fallait s'observer
devant elle et contre elle se defendre.
Dans sa vie agitee madame de la Roche-Odon s'etait trouvee plus d'une
fois au milieu de situations difficiles et douloureuses, jamais plus
horribles cependant, jamais plus cruelles que celle au milieu de
laquelle elle venait d'etre precipitee par la main de son fils;
ce n'etait pas seulement le present, c'etait encore le passe qui
accablaient, qui ecrasaient la femme et la mere.
Sans repondre a son fils, elle se tourna vers madame Pretavoine:
--Madame, vous aviez un but en venant me denoncer ce... faux?
--Empecher le prince de passer en cour d'assises.
--Madame! s'ecria Michel menacant.
Mais on n'intimidait pas madame Pretavoine; sans se troubler, elle
repondit:
--C'est la cour d'assises qui juge les faussaires, et c'est l'intention
des directeurs de la banque de Rome de deposer leur plainte pour que
vous soyez poursuivi.
Sans en avoir l'air elle appuyait sur les mots terribles.
--Et comment comprenez-vous qu'on puisse empecher ce proces, madame?
demanda la vicomtesse; pour cela je suis prete a tout; ce qu'on
demandera je le donnerai, ce qu'on exigera je le ferai.
--Il n'y a qu'a payer, di
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