tout a la fois, ensemble et details, et resument en cinq
minutes ce que l'ecrivain dit en beaucoup de pages, ce que le
naturaliste ne penetre qu'en beaucoup de jours d'observation et de
fatigue. Ils s'emparent du caractere des choses, et, sans savoir le nom
des arbres et la nature des pierres, ils font le portrait des aspects
sentis, portrait penetrant et intelligent, saisissant et fidele, sans
l'effort des penibles investigations.
Ils ecrivent la vie et traduisent le champ de la nature dans une langue
dont les difficultes mysterieuses nous echappent, tant elle parait
claire et facile quand ils la possedent bien.
En regardant ces croquis de M. Grandsire, nous retrouvions toutes les
douces emotions de nos reveries a travers ces promenades enchantees, et,
quant a moi, il m'eut ete bien impossible de dire comment ce petit bout
de papier crayonne si promptement contenait tant de choses auxquelles
j'avais songe, et qui m'apparaissaient de nouveau avec la traduction des
objets dont j'avais savoure la couleur et la forme.
Nous avons pousse, encore une fois, jusqu'a l'anse du grand rocher noir.
Amyntas s'est donne la satisfaction de l'escalader tout entier, pour se
rechauffer d'un bain pris resolument avec ses habits dans la Creuse a la
maniere de Moreau; mais Moreau est amphibie et ne sent ni l'eau ni le
soleil, tandis qu'Amyntas s'enrhume comme un simple petit mortel.
Les trente jours de chaleur tropicale qui viennent de passer sur notre
beau pays n'ont fait que dilater la verdure; les arbres sont aussi
fastueux de feuillage qu'en juin, et, sous leur ombrage epais, les
petites sources murmurent encore et les mousses veloutent le rocher. Les
buis sauvages qui tapissent les talus ont toujours leur air de fete des
Rameaux. Mais les fleurs ont fait leur temps, les pres sont fauches, les
vaches et les chevres broutent partout, et les moissons achevent de
tomber sous la faucille.
Dans quelques jours, il faudra chercher un reste de vie et de fete dans
les endroits incultes. Heureusement, ils ne manquent pas ici, et le
feroce mois d'aout, si triste et si dur dans nos plaines, ne se fera pas
trop sentir dans ces bosquets d'Arcadie.
Mais j'oublie qu'il nous faut partir et laisser la villa d'Amyntas aux
reparations urgentes.
Nous ne reviendrons qu'a l'automne, et c'est alors seulement que nous
deviendrons assez citoyens de ce village pour en penetrer les moeurs et
les coutumes.
En attendant, voici les nouvelles du jour:
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