nt seulement par quelques details, selon les localites:
ceci est la preuve que l'humanite est encore bien pres de son berceau,
ou qu'elle est bien tenace et bien uniforme dans son aptitude a passer
par le meme chemin et a se nourrir des memes idees.
Nous avons montre les souvenirs de l'antiquite modifies dans les idees
ou dans les reves de la race berrichonne par l'influence du
christianisme primitif et du moyen age. Il y a la un monde de fantaisies
perdu pour les classes eclairees, et qui tend aussi a s'effacer de la
croyance et de la memoire des classes rustiques. Il n'est donc pas sans
interet de recueillir les fragments, epars dans toutes les provinces de
France, de cette poesie terrible, riante ou burlesque, qui, dans un
demi-siecle peut-etre, n'aura plus ni bardes, ni rapsodes, ni adeptes.
L'Allemagne passe pour etre la terre classique du fantastique. Cela
tient a ce que des ecrivains anciens et modernes ont fixe la legende
dans le poeme, le conte et la ballade. Notre litterature francaise,
depuis le siecle de Louis XIV surtout, a rejete cet element comme
indigne de la raison humaine et de la dignite philosophique. Le
romantisme a fait de vains efforts pour derider notre scepticisme; nous
n'avons su qu'imiter la fantaisie allemande. Le merveilleux slave, bien
autrement grandiose et terrifiant, nous a ete revele par des traductions
incompletes qui ne sont pas devenues populaires. On n'a pas ose imiter
chez nous des sabbats lugubres et sanglants comme ceux d'Adam
Mickiewicz.
La France populaire des campagnes est tout aussi fantastique cependant
que les nations slaves ou germaniques; mais il lui a manque, il lui
manquera probablement un grand poete pour donner une forme precise et
durable aux elans, deja affaiblis, de son imagination.
Une seule province de France est a la hauteur, dans sa poesie, de ce que
le genie des plus grands poetes et celui des nations les plus poetiques
ont jamais produit: nous oserons dire qu'elle les surpasse. Nous voulons
parler de la Bretagne. Mais la Bretagne, il n'y a pas longtemps que
c'est la France. Quiconque a lu _les Barza-Breiz_, recueillis et
traduits par M. de la Villemarque, doit etre persuade avec moi,
c'est-a-dire penetre intimement de ce que j'avance. _Le Tribut de
Nomenoe_ est un poeme de cent quarante vers, plus grand que l'_Iliade_,
plus complet, plus beau, plus parfait qu'aucun chef-d'oeuvre sorti de
l'esprit humain. _La Peste d'Eliant, les Nains, Desbreiz_ et ving
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