. Ce qu'il admire le plus au ciel, c'est tout ce qu'une
physique savante lui en a devoile; ce sont _les mondes roulant dans
les fleuves d'ether, les astres et leurs poids, leurs formes, leurs
distances_:
Je voyage avec eux dans leurs cercles immenses;
Comme eux, astre, soudain je m'entoure de feux.
Dans l'eternel concert je me place avec eux;
En moi leurs doubles lois agissent et respirent;
Je sens tendre vers eux mon globe qu'ils attirent:
Sur moi qui les attire ils pesent a leur tour.
On dirait, chose singuliere! que l'esprit du poete se condense et se
materialise a mesure qu'il s'agrandit et s'eleve. Il ne lui arrive
jamais, aux heures de reverie, de voir, dans les etoiles, des _fleurs
divines qui jonchent les parvis du saint lieu_, des ames heureuses
qui respirent un air plus pur, et qui parlent, durant les nuits, un
mysterieux langage aux ames humaines. Je lis, a ce propos, dans un
ouvrage inedit, le passage suivant, qui revient a ma pensee et la
complete:
"Lamartine, assure-t-on, aime peu et n'estime guere Andre Chenier: cela
se concoit. Andre Chenier, s'il vivait, devrait comprendre bien mieux
Lamartine qu'il n'est compris de lui. La poesie d'Andre Chenier n'a
point de religion ni de mysticisme; c'est, en quelque sorte, le paysage
dont Lamartine a fait le ciel, paysage d'une infinie variete et d'une
immortelle jeunesse, avec ses forets verdoyantes, ses bles, ses vignes,
ses monts, ses prairies et ses fleuves; mais le ciel est au-dessus, avec
son azur qui change a chaque heure du jour, avec ses horizons indecis,
ses _ondoyantes lueurs du matin et du soir_, et la nuit, avec ses fleurs
d'or, _dont le lis est jaloux_. Il est vrai que du milieu du paysage,
tout en s'y promenant ou couche a la renverse sur le gazon, on jouit du
ciel et de ses merveilleuses beautes, tandis que l'oeil humain, du haut
des nuages, l'oeil d'Elie sur son char, ne verrait en bas la terre
que comme une masse un peu confuse. Il est vrai encore que le paysage
reflechit le ciel dans ses eaux, dans la goutte de rosee, aussi bien que
dans le lac immense, tandis que le dome du ciel ne reflechit pas les
images projetees de la terre. Mais, apres tout, le ciel est toujours le
ciel, et rien n'en peut abaisser la hauteur." Ajoutez, pour etre juste,
que le ciel qu'on voit du milieu du paysage d'Andre Chenier, ou qui s'y
reflechit, est un ciel pur, serein, etoile, mais physique, et que la
terre apercue par le poete sacre, de dessus son c
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