ens accessoires.
La comparaison entre la peinture et la decoration theatrale peut encore
nous suggerer quelques reflexions importantes. Un tableau ne represente
jamais qu'un moment d'une action, tandis que la mise en scene doit
s'adapter a des moments successifs. Mais, pour un meme moment, le
peintre et le decorateur ne peuvent de la meme maniere associer la
nature a des actes humains. Le premier peut saisir la nature dans un
mouvement qui ne s'acheve pas, tandis que le decorateur sera oblige
d'achever le mouvement, ce qui est incompatible avec l'immobilite
decorative. Ainsi le Titien, dans un de ses plus beaux tableaux,
aujourd'hui detruit par un incendie, a represente un arbre tordu par le
vent et aux pieds duquel un dominicain succombe sous le poignard d'un
assassin. Le peintre a ainsi associe une tourmente de la nature a un
acte criminel. La representation n'en serait pas possible au theatre par
les memes moyens; car la nature y est immobile et le vent n'y courbe pas
les arbres. C'est par le sifflement du vent et le bruit du tonnerre que
le metteur en scene arriverait a produire un effet analogue. L'effet
obtenu, qu'augmenterait encore l'assombrissement du jour et le mouvement
des nuages sur le disque lunaire, obtenu par l'electricite, depasserait
peut-etre en intensite d'impression l'effet obtenu par le peintre; mais,
qu'on le remarque, il serait produit par un appareil etranger a la
scene. Les arbres de la decoration, quelque fort que soit le sifflement
du vent, ne resteront pas moins immobiles, et que ce soit avant, pendant
ou apres la tempete, ils seront toujours identiques, a eux-memes.
Aussi, comme la decoration ne peut varier ses effets selon les moments
successifs d'une action, elle doit etre, soit dans le mouvement, soit
dans le ton des choses inanimees, en relation generale avec l'action
et non en relation speciale avec un des moments particuliers de cette
action. Un decorateur qui voudrait associer sa toile avec un instant
unique exercerait une impression preventive et detruirait par avance
l'effet qu'il aurait voulu obtenir; et si l'effet persistait apres
l'achevement de l'acte associe, il redeviendrait contradictoire comme
il l'etait anterieurement au moment choisi. C'est donc une impression
generale que doit s'attacher a produire le decorateur; et cette loi
n'est pas sans creer des obligations semblables au metteur en scene.
Celui-ci sans doute peut a son gre dechainer le vent et le tonnerre; il
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