e et d'une clarte parfaite.
--Et comment faire pour savoir? dit Genevieve.
--Laissez-moi vous apporter mes cahiers et mon herbier; avec une heure
d'application par jour, vous en saurez dans un mois plus que M. Forez
lui-meme.
--Oh! que je le voudrais! dit Genevieve; mais cela est impossible.
Orpheline et seule comme je suis, je ne puis recevoir vos visites sans
m'exposer aux plus mechants propos.
--N'etes-vous pas au-dessus de ces pueriles attaques? dit Andre. A quoi
vous a servi toute une vie de retraite et de prudence, si vous etes
aussi vulnerable que la plus etourdie de vos compagnes, et si, au
premier acte d'independance que votre raison voudra tenter, l'opinion ne
vous tient aucun compte d'une sagesse que vous avez si bien prouvee?
--L'opinion! l'opinion! dit Genevieve en rougissant. Ce n'est pas que je
la respecte, je sais ce qu'elle vaut, dans ce pays du moins; mais je la
crains. Je n'ai pas de famille, personne pour me proteger; la mechancete
peut me prendre a partie, comme elle a fait tant de fois pour de pauvres
filles qui avaient bien peu de torts a se reprocher. Elle peut me rendre
bien malheureuse...
--Oui, si vous manquez de caractere; mais si vous avez le juste orgueil
de la vertu, si vous etes penetree de votre propre dignite...
--Ne dites pas cela, on me reproche deja d'etre trop fiere.
--Si j'avais le droit de vous faire un reproche, ce ne serait pas
celui-la...
--Et lequel donc? dit Genevieve vivement; puis elle s'arreta tout a
coup, et Andre lut sur son visage qu'elle etait fachee d'avoir laisse
echapper cette question, et qu'elle craignait une reponse trop
significative.
--Je n'ai pas ce droit, repondit-il tristement, et je ne me flatte pas
de l'avoir jamais. Vous craignez le blame; quelle raison assez forte
auriez-vous pour le braver? Ne faites pas attention a ce que je vous ai
dit. Je deraisonne souvent.
--Cet aveu n'est pas rassurant, dit Genevieve en s'efforcant de sourire,
pour quelqu'un qui comptait vous demander souvent des conseils.
--Sur la botanique? reprit Andre. Je vous enverrai mes cahiers. Si
quelque passage vous embarrasse, veuillez faire un signe sur la marge et
me le renvoyer; je demanderai une explication detaillee a M. Forez et
le prierai de la rediger lui-meme. Je vous la ferai parvenir par
mademoiselle Marteau, ou par mademoiselle Henriette, ou par telle autre
personne que vous me designerez. De cette maniere, il me sera impossible
de vous compromettr
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