a son mari, et
de chercher a connaitre le parti qu'il prendrait en apprenant le
changement survenu dans leur position respective. Mittler lui refusa
ce service.
--Tout est fait, tout est arrange, s'ecria-t-il, vous pouvez lui
envoyer votre lettre par un messager quelconque. J'ai affaire
ailleurs, je ne reviendrai que pour vous faire mon compliment sur
votre reconciliation, et pour assister au bapteme.
A ces mots il sortit avec precipitation, laissant Charlotte fort
mecontente et tres-inquiete; elle savait que la petulance de cet homme
bizarre lui avait valu presque autant de defaites que de succes, et
qu'il avait, en general, la funeste habitude de regarder comme des
faits accomplis les esperances que lui suggeraient les impressions du
moment; aussi etait-elle loin de partager sa confiance et sa securite.
Edouard s'etait flatte que Mittler lui apporterait la reponse de sa
femme, et la lettre qui lui fut remise par un messager lui causa un
mouvement de terreur. Apres l'avoir longtemps tenue dans ses mains
sans oser l'ouvrir, il la decacheta enfin et la parcourut des yeux.
Qui oserait peindre les emotions contradictoires dont son ame fut
bouleversee en lisant le passage suivant de la lettre de Charlotte:
"Souviens-toi de l'heure nocturne ou tu vins visiter ta femme en amant
aventureux, ou tu l'attiras presque malgre elle dans tes bras, sur ton
coeur!... Ne voyons plus desormais dans cet evenement bizarre qu'un
arret de la Providence. Oui, la Providence a resserre nos rapports par
un lien nouveau, au moment meme ou le bonheur de notre vie etait sur
le point de s'aneantir!"
Lorsqu'un gentilhomme se trouve reduit a chercher les moyens de
s'arracher a lui-meme et de tuer le temps, la chasse et la guerre se
presentent naturellement a son esprit.
Nous ne chercherons pas a donner une juste idee de tout ce qui se
passait alors dans le coeur d'Edouard. Craignant de succomber dans le
combat qu'il se livrait a lui-meme, il eprouva le besoin de braver des
perils materiels. Au reste, la vie lui etait devenue si insupportable,
qu'il se fortifiait avec complaisance dans l'idee que sa mort seule
pouvait rendre le repos a ses amis, et surtout a sa chere Ottilie.
Ses sinistres projets ne rencontrerent aucun obstacle, car il ne les
confia a personne. Son premier soin fut de faire son testament avec
toutes les formalites necessaires, et il se sentit presque heureux en
dictant la clause par laquelle il leguait a Ottilie, la met
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