dent
imprevu, et sans lequel peut-etre il se serait toujours borne a
esperer en secret.
La maitresse de la pension deja avancee en age et sans enfants,
cherchait depuis longtemps une personne digne de la remplacer un jour,
et de devenir en meme temps son heritiere. Son choix s'etait arrete
sur le professeur, mais il ne pouvait completement repondre a ses
esperances, qu'en se mariant avec une jeune personne capable de
remplir les devoirs difficiles qui, dans un pareil etablissement,
ne peuvent etre confies qu'a une femme. Le coeur du professeur
appartenait a son ancienne eleve, des considerations de sang lui
faisaient croire qu'on ne la lui accorderait pas, quand tout a coup un
evenement fortuit sembla lui prouver le contraire.
Deja le mariage de Luciane l'avait autorise a esperer le retour
d'Ottilie a la pension, et les bruits qui circulaient sur l'amour du
Baron pour la niece de sa femme rendaient pour ainsi dire ce retour
indispensable. Ce fut en ce moment que le Comte et la Baronne vinrent
visiter le pensionnat. Dans toutes les phases de la vie sociale,
l'apparition de quelque personnage important amene toujours de graves
et subits changements.
Les nobles epoux, que deux fois deja nous avons vus au chateau
de Charlotte, avaient ete si souvent consultes sur le merite des
pensionnats ou leurs amis voulaient placer leurs enfants, qu'ils
avaient pris le parti d'apprendre a connaitre par eux-memes le plus
celebre de tous, celui ou s'etait formee la brillante Luciane. Leur
mariage recent leur permettait de se livrer ensemble a cet examen qui,
chez la Baronne, avait un motif secret et presque personnel.
Pendant son dernier sejour au chateau d'Edouard, Charlotte l'avait
initiee a toutes ses inquietudes et consultee sur les moyens de
sortir de l'embarras dans lequel elle se trouvait; car si d'un cote
l'eloignement d'Ottilie lui paraissait plus que jamais necessaire,
de l'autre les menaces de son mari la mettaient dans l'impossibilite
d'agir. La Baronne etait femme a comprendre que dans une pareille
situation on ne pouvait employer que des moyens detournes, et lorsque
son amie lui parla de l'amour d'un des professeurs du pensionnat pour
Ottilie, elle se promit d'exploiter ce sentiment pour arriver a un
resultat decisif. Lorsqu'elle visita ce pensionnat, ce professeur seul
captiva son attention; elle l'interrogea sur Ottilie dont le Comte fit
aussitot un eloge pompeux. Cette jeune personne l'avait distingue
de la foul
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