ille que, si
elle voulait avoir confiance au procede qui pour l'instant venait
d'augmenter son mal, il l'en guerirait promptement et pour toujours.
Charlotte repoussa cette offre bienveillante avec beaucoup de
vivacite, elle avait toujours eu une apprehension instinctive pour
cette experience, et il n'entrait pas dans ses principes de laisser
faire aux siens ce qu'elle n'approuvait pas completement.
Les deux voyageurs venaient d'executer leur projet de depart, et
les dames, que plus d'une fois ils avaient peniblement affectees,
desiraient cependant pouvoir un jour les retrouver dans la societe.
Devenue entierement libre, Charlotte profita de la belle saison
pour rendre les nombreuses visites par lesquelles tous ses voisins
s'etaient empresses de lui prouver leur interet et leur amitie. Le peu
d'heures que l'accomplissement de ce devoir lui permettait de passer
chez elle, etait consacre a son enfant qui, sous tous les rapports,
meritait une affection et des soins extraordinaires. Tout le monde,
au reste, voyait en lui un don merveilleux de la Providence, et il
justifiait cette opinion. Doue d'une sante robuste, il grandissait et
se developpait rapidement, et la double ressemblance qui, le jour de
son bapteme, avait cause tant de surprise, devenait toujours plus
frappante. La coupe de son visage et le caractere de ses traits, le
rendaient l'image vivante du Capitaine; mais ses yeux semblaient avoir
ete modeles sur ceux d'Ottilie, et la meme ame s'y reflechissait.
Cette singuliere parente et surtout le sentiment qui pousse les femmes
a etendre l'amour qu'elles ont voue au pere sur les enfants dont elles
ne sont pas les meres, rendaient le fils d'Edouard cher a Ottilie.
L'entourant des soins les plus tendres, elle etait pour lui une
seconde mere, ou plutot une mere d'une nature plus elevee, plus noble
que celle qui lui avait donne la vie. Cette affection avait excite la
jalousie de Nanny, qui s'etait eloignee peu a peu de sa maitresse, et
qui avait fini par pousser l'obstination jusqu'a retourner chez ses
parents, ou elle vivait dans un isolement volontaire.
Ottilie continua a promener l'enfant et s'accoutuma ainsi a de longues
excursions; aussi avait-elle soin d'emporter toujours un petit flacon
de lait pour donner a son petit favori la nourriture dont il avait
besoin. Comme elle oubliait rarement de se munir d'un livre, elle
formait une gracieuse _Penserosa_, quand elle marchait ainsi lisant et
tenant ce bel enfan
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