le ne pourrait opposer aucun motif raisonnable a la realisation
de cette promesse. De son cote Charlotte n'avait cherche qu'a retarder
la demande formelle du Professeur, tout en s'assurant de la realite de
ses intentions, dans lesquelles elle voyait un moyen favorable pour
assurer l'avenir de sa niece. Il est vrai qu'elle ne pouvait prendre
ce parti qu'avec le consentement de son mari, dont elle attendait le
retour immediatement apres la naissance de son enfant, se flattant
toujours que le titre de pere suffirait pour reveiller dans son
coeur tous les devoirs et toutes les affections du mari, et qu'il
s'estimerait heureux de pouvoir dedommager Ottilie de ses esperances
trompees, on la mariant a un homme, si digne d'un amour qu'elle ne
pourrait manquer de lui accorder.
Lorsque des personnes qui cherchent depuis longtemps a s'expliquer sur
une affaire importante et grave, sont parvenues enfin a la mettre en
question, et se sont convaincues que l'instant de la traiter a fond
n'est pas venu encore, leur entretien est toujours suivi d'un silence
qui ressemble a l'embarras, a la gene.
Charlotte et sa niece ne trouvaient plus rien a dire, et le Professeur
se mit a feuilleter le volume de gravures contenant les diverses
especes de singes, reste au salon depuis qu'on l'y avait apporte pour
amuser Luciane. Ce recueil etait peu de son gout sans doute, car il
le referma presque aussitot; mais il parait avoir donne lieu a une
conversation dont nous retrouvons les principaux traits dans le
journal d'Ottilie.
* * * * *
EXTRAIT DU JOURNAL D'OTTILIE.
"Je ne comprends pas comment on peut consacrer son temps et son art a
retracer l'image d'un singe. Il me semble qu'il est presque avilissant
d'accorder a ces vilaines creatures une place dans la famille des
animaux; mais il faut etre mechant et malicieux pour retrouver sous
ces masques hideux des etres humains, et surtout ceux dont se compose
le cercle de nos amis et de nos connaissances."
"C'est toujours par un travers d'esprit que nous aimons a nous
occuper des charges et des caricatures. Je remercie beaucoup mon bon
professeur de ne m'avoir pas impose l'etude de l'histoire naturelle;
je n'aurais jamais pu me familiariser avec les vers et les scarabees."
"Il vient de m'avouer qu'il est de mon avis a ce sujet, et que nous
ne devrions connaitre la nature qu'en ce qu'elle fait immediatement
mouvoir et vivre autour de nous. Chaque arbre qui verdit
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