Pere, a son Roi ne scait plus que repondre;
Sa Maraine aussi-tot la prenant par la main,
Il ne faut pas, lui dit-elle a l'oreille,
Demeurer en si beau chemin,
Est-ce une si grande merveille
Que tous ces dons que vous en recevez
Tant qu'il aura l'Asne que vous scavez
Qui d'ecus d'or sans cesse emplit sa bource;
Demandez-lui la peau de ce rare Animal,
Comme il est toute sa resource,
Vous ne l'obtiendrez pas, ou je raisonne mal.
Cette Fee etoit bien scavante,
Et cependant elle ignoroit encor
Que l'amour violent pourvu qu'on le contente,
Conte pour rien l'argent & l'or;
La peau fut galamment aussi tot accordee
Que l'Infante l'eut demandee.
Cette Peau quand on l'apporta
Terriblement l'epouvanta
Et la fit de son sort amerement se plaindre,
Sa Maraine survint & lui representa
Que quand on fait le bien on ne doit jamais craindre;
Qu'il faut laisser penser au Roy
Qu'elle est tout a fait disposee
A subir avec lui la conjugale Loi;
Mais qu'au meme moment seule & bien deguisee
Il faut qu'elle s'en aille en quelque Etat lointain
Pour eviter un mal si proche & si certain.
Voici, poursuivit-elle, une grande cassette
Ou nous mettrons tous vos habits
Votre miroir, votre toillette,
Vos diamans & vos rubis.
Je vous donne encor ma Baguette;
En la tenant en votre main
La cassette suivra votre meme chemin.
Toujours sous la Terre cachee;
Et lorsque vous voudrez l'ouvrir
A peine mon baton la Terre aura touchee
Qu'aussi-tot a vos yeux elle viendra s'offrir.
Pour vous rendre meconnaissable
La depoueille de l'Asne est un masque admirable
Cachez-vous bien dans cette peau,
On ne croira jamais, tant elle est effroyable
Qu'elle renferme rien de beau.
La Princesse ainsi travestie
De chez la sage Fee a peine fut sortie,
Pendant la fraicheuer du matin
Que le Prince qui pour la Fete
De son heureux Hymen s'apprete
Apprend tout effraye son funeste destin.
Il n'est point de maison, de chemin, d'avenue
Qu'on ne parcoure promptement,
On ne peut deviner ce qu'elle est devenue.
Par tout se repandit un triste & noir chagrin
Plus de Nopces, plus de Festin,
Plus de Tarte, plus de Dragees,
Les Dames de la Cour toutes decouragees
N'en dinerent p
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